Alors que les images des athlètes des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ont émerveillé petits et grands, l’artiste bolivien-algérien Daniel Mebarek raconte une autre histoire olympique, celle des ouvrier·ères des chantiers des sites de compétitions.
Dans le cadre de la commande Récit(s) des Jeux du département de la Seine-Saint-Denis, le photographe bolivien-algérien Daniel Mebarek s’associe à l’autrice Chloé Vivarès pour une aventure visuelle et textuelle au cœur du chantier olympique Prisme à Bobigny. Leur objectif ? Révéler les dessous des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. « Le coût social et environnemental des mégas événements sportifs, tels que les Jeux olympiques et la Coupe du Monde, est souvent très élevé. Il y a un nettoyage social, une exploitation d’une main-d’œuvre précaire et racisée ou encore l’ultra-surveillance », explique l’artiste. Paris 2024 ne fait pas exception. Dans la presse, les polémiques se succèdent : expulsion massive des populations jugées « indésirables », emploi de travailleur·ses sans papiers sur les chantiers, pollution de la Seine, usage de drones et algorithmes de surveillance à outrance… « Face à ces réalités, nous avons voulu créer un nouvel imaginaire des JO qui puisse mettre en lumière la main-d’œuvre invisibilisée derrière l’organisation de cet immense événement sportif », confie Daniel Mebarek. Il titre le projet Olympiades populaires en référence à un événement sportif prévu à Barcelone en 1936 en guise de protestation contre Jeux olympiques de Berlin, organisés sous le régime nazi. « Ces « jeux antifascistes » furent annulés à la suite du soulèvement militaire du général Francisco Franco », ajoute-t-il.
Co-construire une nouvelle histoire des Jeux
La pratique de Daniel Mebarek se développe sur le terrain, explorant les possibilités que permettent la photographie documentaire et ses limites. Dans cette veine d’appréhender le monde différemment, Olympiades populaires se construit dans le dialogue et dans la collaboration avec les ouvrier·ères. « La notion de dignité humaine est au centre de mon travail, avance le photographe. Plutôt que de chasser des moments, je voulais co-construire des images avec elleux. » La mise en scène s’impose. Gilets de sécurité sur les épaules et casques de protection, les ouvrier·ères se prêtent au jeu, choisissant le sport qu’iels aimeraient pratiquer sur le chantier olympique. Gymnastique rythmique, lancer de javelot, escrime ou football, il y en a pour tous les goûts. En parallèle des images en mouvement de Daniel Mebarek, les textes fictifs de Chloé Vivarès annoncent le genre de médailles que ces sportifs de l’ombre pourraient recevoir : « Maillot distinctif pour le meilleur marcel blanc ou lauriers du réveil matinal », évoque-t-il. « Il en ressort une articulation intéressante entre les images, qui présentent les ouvriers comme des athlètes olympiques, et les textes, qui décrivent les différents rites et métiers du chantier comme des disciplines sportives » conclut l’artiste.