Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Inspirée par les dadas, les surréalistes et le pop art, Margaux Hug brouille, avec ses collages, les frontières entre la réalité et sa représentation.
« La photographie me permet de faire se rencontrer le réel et l’imaginaire dans un cadre graphique très défini »
, déclare Margaux Hug. Photographe et directrice artistique de 32 ans, l’artiste a fait ses armes à Olivier de Serres, en communication visuelle, et aux Gobelins, travaillant ensuite en tant qu’agente de publicité avant de se mettre à son compte. Un parcours qui forge son esthétique singulière. « Mon approche est une combinaison entre direction artistique et 8e art. L’imaginaire y est très important, l’univers réinterprété, sublimé par des images surréelles. L’idée de sortir les objets ou personnes de leur contexte pour les mettre en scène dans des univers surréalistes me guide », confie-t-elle.
Découpages, collages, aplats de couleurs, tons vifs, vibrants, associations incongrues d’éléments, figures hybrides, mêlant accessoires, animaux et humains, transformant les corps en silhouettes grotesques… Dans l’univers de Margaux Hug, les choses sont sans cesse détournées. Elles se métamorphosent, changent d’utilités, trompent nos sens et invitent notre œil à sortir de sa zone de confort, à repenser l’organisation du monde. Une expérience rendue possible grâce à une exploration technique constante. « Certaines de mes images sont réalisées entièrement à partir de collages papier que je photographie ensuite, alors que d’autres sont le fruit d’une combinaison entre des collages (2D) et des objets du quotidien (3D). Cela crée une illusion d’optique entre ces dimensions – entre réalité et représentation », explique-t-elle.
Un jeu de contrastes
C’est à la Whitechapel Gallery de Londres, en 2014, que l’artiste découvre la dadaïste Hannah Höch, dont l’écriture automatique la marque profondément, et définit dès lors son leitmotiv. « Le collage permet de créer des images très spontanées qui convoquent l’inconscient, précise-t-elle. J’ai ainsi combiné les univers dadaïste et surréaliste des années 1920 avec une approche plus contemporaine, faisant davantage écho au monde d’aujourd’hui. C’est ce mélange des époques, des styles qui est passionnant. Les objets sont sortis de leur contexte : des chaussures au milieu d’oiseaux ou de fruits découpés, des animaux dans l’espace, des hommes avec des têtes de papillons… Et le recours au gif permet de jouer davantage, en donnant vie à l’objet inanimé ! »
À ces deux courants artistiques, s’ajoute le pop art, dont les couleurs vives, fortes, infusent les créations de Margaux Hug. Tout comme le goût de ces artistes pour l’utilisation d’objets populaires, issus de la grande consommation. Un détail amusant, puisque la créatrice, forte de son expérience en agence de publicité, s’amuse à détourner des éléments plus précieux, venus du monde de la mode. En témoigne son collage intitulé Bag-Eyes, emblématique de son approche. « D’une part, le sac est coupé en deux et retourné. Il perd sa fonction initiale pour devenir un objet purement graphique et pictural. D’autre part, les yeux permettent une personnification de l’objet. C’est un jeu de contrastes, tant par les éléments que les nuances », commente-t-elle. Et c’est ce jeu, ce va-et-vient entre les esthétiques, les thématiques, l’humain et l’inanimé qui définit l’œuvre de l’autrice. À l’aide de ses collages, elle questionne notre perception du réel et le transforme en un espace instable, ludique, elle construit un monde léger, où humour et poésie règnent. Un univers fait d’illusion, dont les limites ne cessent d’être repoussées.
© Margaux Hug