Johanna Senpau et Victor Zurbarán, nos coups de cœur #316 capturent tous deux l’urbain. La première documente un paysage mélancolique, gommé par la neige, et le second donne à voir la déshumanisation de l’espace.
Johanna Senpau
« Apprendre pour moi ne passait pas par les études, mais par la découverte du monde. À partir de mes vingt ans, et durant six ans, je suis partie voyager en camion – Croatie, Grèce, Irlande, Maroc, Mauritanie, Sénégal, Inde… – C’est de cette expérience que m’est venu le désir de photographier pour rendre compte »,
confie Johanna Senpau. À son retour en France, l’artiste s’inscrit à l’ETPA de Toulouse, d’où elle sort diplômée en 2016. Désormais auteure indépendante, elle s’attache à réaliser des projets inspirés par les motivations, les peurs et les désirs humains. « Pour Aquilon, tout est parti d’une paire de chaussures de marche fondue ! Le froid, par mes pieds, traversant mon corps, a créé l’envie de capturer ce sentiment de solitude, cette sensation d’indéfini, de vide, dans ce paysage de stations de sports d’hiver, rendu fantasmagorique par un rideau de neige », raconte-t-elle. Dans ses images, le monde semble gommé. Des traces de pas, des freins de voiture laissent des calligraphies sur la terre blanche. Seules les quelques silhouettes errantes rappellent la présence de l’Homme – une présence insignifiante dans cette tempête d’éléments.
© Johanna Senpau
Victor Zurbarán
Né à Madrid en 1978, Victor Zurbarán a grandi en périphérie d’une grande ville. « Ce détail a généré en moi des interrogations que j’ai formulées à l’aide de la photographie. Cela m’a poussé à m’intéresser à des thèmes universels, tels que l’espace, la mémoire ou encore l’identité », explique-t-il. Formé au 8e art dès le lycée, l’auteur aime capturer les lieux, et leur capacité à raconter une infinité d’histoires « à la fois passées et hypothétiques ». « J’aime me concentrer sur un endroit, prendre le temps de l’apprivoiser, de le photographier à mon rythme », précise-t-il. Dans Emptiness, Victor Zurbarán s’intéresse à l’homogénéisation des espaces urbains. Chaque image présente un dispositif construit dans une ville, un pays différent – de l’Espagne à la France, en passant par la Suisse et l’Allemagne. « Ce projet évoque la déshumanisation de l’espace, sa transformation en une simple fonctionnalité productive, homogène et standardisée », ajoute le photographe. Éclairés par des lumières artificielles, ces endroits nous invitent à questionner les métamorphoses de l’urbain.
© Victor Zurbarán
Image d’ouverture : © Victor Zurbarán