Nos coups de cœur #333, Mélanie Dornier et Vijay Sarathy, construisent tous deux des univers délicats. L’une expérimente avec le cyanotype, et l’autre met en image des visions venues de son subconscient.
Mélanie Dornier
Après une formation dans le social, Mélanie Dornier a découvert en la photographie un médium capable de transmettre les valeurs qui lui sont chères. Privilégiant d’abord des projets documentaires au long cours, l’autrice côtoie ensuite le monde de l’art contemporain et se lance dans la création d’œuvres plus intimes. Inspirée par les travaux de Claudine Doury, Rebecca Woodman ou encore Sally Mann, elle joue avec le médium et réalise des images délicates « qui véhiculent un message ». Une volonté que l’on retrouve dans la série L’empreinte de l’oubli. « J’ai toujours été attirée par les procédés anciens. Dans mon travail, je m’attarde à photographier le vécu pour mieux comprendre l’actuel. Le confinement m’a permis de prendre le temps d’expérimenter. Les notions de traces et de temps sont omniprésentes dans mon travail – la photographie de contact comme procédé a donc tout son sens », raconte-t-elle. Et dans cet univers visuel aux tons bleutés, l’artiste interroge des thématiques qui la fascinent : l’identité féminine, et la mutation du territoire. « J’ai autant aimé le côté manuel que la dimension imprévisible du procédé. J’y ai quelque part reproduit un travail entre le déclin et la beauté, que l’on retrouve dans mes images », ajoute-t-elle. Accompagnée d’un manifeste intitulé W.I.T.C.H (Women International Terrorism Conspiracy from Hell), la série fait dialoguer – tout en sensibilité – recherches esthétiques et inspirations sociétales.
© Mélanie Dornier
Vijay Sarathy
« J’ai besoin d’accéder à un certain état d’esprit pour créer, et m’isoler dans la nature m’aide beaucoup. Mon travail est inspiré par mon propre ressenti – les sensations de plénitude et d’émerveillement qui naissent et que je ressens de manière viscérale lorsque je m’immerge dans le paysage. C’est quelque chose de très difficile à retranscrire, mais que j’essaie tout de même d’illustrer »
, confie Vijay Sarathy. Depuis 2017, le photographe indien expérimente avec le 8e art et publie ses essais sur Instagram. « J’ai su très tôt que je n’avais pas envie de réaliser des images réalistes. À l’époque, je connaissais beaucoup d’auteurs occidentaux qui utilisaient ce médium pour réaliser des œuvres fantastiques et surréalistes. Cela m’a profondément marqué », se souvient-il. Fasciné par notre subconscient et la poésie qui en émerge, Vijay Sarathy utilise le monde végétal comme un portail vers nos obsessions, nos besoins primaires. Et c’est grâce aux retouches qu’il transforme ses clichés en créations oniriques. Spontané, il se plonge dans la musique pour donner vie à ses idées. « J’essaie de ne pas trop penser en amont, je préfère faire des erreurs et progresser jusqu’à ce que la photographie me parle enfin. C’est un processus déstructuré », précise-t-il. Mystérieuses, ses créations se lisent comme de brèves excursions dans son imaginaire.
© Vijay Sarathy