Bastien Brillard et Élise Toïdé, nos coups de cœur #354, retranscrivent des sensations en images. L’un rédige une lettre passionnée à la Réunion, et l’autre explore la rêverie adolescente en plein été.
Bastien Brillard
Ancien étudiant en géographie, c’est durant un long voyage que Bastien Brillard tombe sous le charme du médium photographique. En 2006, il s’installe à l’île de la Réunion, où il réalise ses premiers sujets, épaulés par d’autres photographes de la région. « Nous nous appliquions à produire des images différentes de la vision dominante du folklore tropical », précise l’auteur. Inspiré par ses études, il explore, à travers l’image, les relations entre les populations et leur cadre de vie. « Puis, en 2014, j’ai décidé de traverser le miroir de l’exclusion : de me concentrer non plus sur l’exclusion subie, mais celle volontaire », ajoute-t-il. Un thème qui le pousse à documenter une vision romantique du regroupement, organisé pour créer une utopie alternative, face aux enjeux contemporains. Mais Entre toi et moi se lit comme un travail plus personnel. Une déclaration à la Réunion. « Je la fréquente depuis 1999, après huit ans de vie commune, je ne pouvais pas partir sans laisser un mot ! », s’amuse-t-il. En noir et blanc, Bastien Brillard capte l’émotion, les sensations fortes d’une fusion avec un territoire. « Une histoire oscillant entre l’amour éternel et la haine viscérale. Inexplicable. Et, comme ce qu’on aime trop peut finir par nous détruire, je l’ai quittée ! Partir pour me retrouver. Partir pour avancer et respirer. Partir pour me souvenir. Partir pour être et pour aimer. Partir pour avoir peur et me sentir vivre. Partir c’est aussi un arrachement, un renoncement. Partir vulnérable et fragile, mais partir quand même. Partir », confie-t-il. Un projet intemporel aussi intime qu’universel.
© Bastien Brillard
Élise Toïdé
« Mon travail est intuitif. Lorsque je réalise un portrait, ou bien une histoire autour d’une personne, j’aime me promener avec elle. Apprendre à la connaître, à la photographier naturellement, dans un endroit qui nous convient. J’aime laisser les choses venir à moi »,
confie Élise Toïdé. Aujourd’hui installée à Montreuil, l’artiste a grandi dans le Sud de la France, et habité à Brooklyn – dont l’ambiance et les rues singulières la pousse à débuter la photographie. Shootant à l’argentique, elle aborde, à travers ses images, « les notions de mémoire, d’intime, et de passage – notamment autour de l’adolescence et du voyage. La mémoire des lieux, de l’enfance, l’empreinte des souvenirs réinventés, sujets à interprétation. Je cherche les liens entre mondes visibles et intérieurs. Mes images doivent rester comme des fantômes, des impressions, des sensations », précise-t-elle. Une recherche de la métamorphose, de la vulnérabilité retrouvée dans Saison Sèche, une série réalisée en plein été. « Il s’agit d’une histoire d’adolescente, qui se déroule pendant les grandes vacances, lorsque le temps est étiré. J’ai cherché à retranscrire le rapport au temps particulier de la jeunesse, celui de l’ennui, de l’absence. Des moments suspendus, de flottaison », ajoute la photographe. Et dans cet univers léger, langoureux, il nous semble percevoir les dernières chaleurs estivales…
© Elise Toidé
Image d’ouverture : © Bastien Brillard