Les coups de cœur #383

04 avril 2022   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les coups de cœur #383

Entre engagement et cinématographie, nos coups de cœur #383, Alan Jeuland et Katalin Kedves, donnent à voir deux univers complètement différents. L’un s’intéresse aux violences policières et l’autre fait de son quotidien un film dramatique.

Alan Jeuland

« J’aurais jamais pensé un jour que je me ferais tirer dans le visage. J’ai grandi en banlieue, ça aurait pu m’arriver. Et là, je vais manifester calmement pour ma grand-mère, pour ma mère. Pour les retraités. Vraiment pacifique, vraiment pas dans la haine du tout. Je me fais tirer dessus »

, confie Vanessa, auxiliaire de vie en gré à gré. Pour Vitalia, photographe, la manifestation reste un traumatisme : « J’ai eu peur de parler au début, tellement ça a été trash. J’ai eu peur des pressions, j’ai vraiment eu l’impression d’échapper au pire », raconte-t-elle. Une anxiété partagée également par Guilhem, étudiant en langue ancienne. « Ils étaient quatre ou cinq sur moi, un à chaque bras, un qui m’étranglait, un qui me rouait de coups et potentiellement un autre avec la grenade. Je fais pas beaucoup plus d’un mètre soixante, je suis petit, moins de 50 kilo. Je ne peux même pas donner mon sang, je suis myope… Je suis pas dangereux, quoi », assène-t-il. « En France, la police enquête sur la police, donc forcément, elle va orienter ses questions de telle sorte qu’on va totalement écarte l’usage de la force disproportionnée et la personne peut même se retrouver mise en cause », révèle l’avocate Claire Dujardin. Dans Contre-coups, Alan Jeuland donne la parole à dix témoins de la violence policière. Victimes comme défenseurs, tous partagent des souvenirs douloureux. De Paris à Toulouse, Marseille ou encore Montpellier, le photographe, ancien étudiant du 75 à Bruxelles, et de l’ENSP d’Arles a choisi de « faire de la photo de manif un peu différente, plus figée, plus calme, en [s]’attardant sur du détail ou du symbole, en faisant gaffe à la lumière, aussi ». Au moyen format, l’auteur s’éloigne des représentations habituelles de ces conflits, pour souligner le drame, le danger, les conséquences de tels actes. Au cœur de la série, se croisent portraits dystopiques des forces de l’ordre, fumigènes menaçants, mutilations et prothèses réparatrices. Un ensemble poignant, faisant résonner la gravité d’un réel banalisé.

© Alan Jeuland© Alan Jeuland
© Alan Jeuland© Alan Jeuland
© Alan Jeuland© Alan Jeuland

© Alan Jeuland

Katalin Kedves

Voitures rétro, champs fleuris, couples mystérieux, scènes nocturnes éclairées par des phares aveuglants… Les images de Katalin Kedves semblent tout droit tirées d’un film. La photographe hongroise de 26 ans s’est d’abord intéressée à la mode, avant de se tourner vers une œuvre plus personnelle. « La pandémie m’a permis d’apprendre à mieux me connaître, et à gagner en maturité », explique-t-elle. Fascinée par le cinéma américain, l’autrice s’attache à reproduire, à travers ses clichés, l’énergie propre au 7e art. « Mes thématiques fétiches ? Les vieilles voitures américaines, les personnages rebelles, les vastes horizons sublimés par la lumière du crépuscule, la transition entre le jour et la nuit… Toutes mes photographies sont liées à la notion de liberté », confie-t-elle. Imaginées en séries, ses créations se lisent comme un étrange roman-photo, relatant une scène sous différents angles, différents points de vue. Au cœur de son compte Instagram, les clichés résonnent, se font échos, se complètent. Comme un leitmotiv s’enrichissant à chaque nouvelle publication. Un concept que Katalin Kedves espère bientôt développer sous la forme d’un livre.

© Katalin Kedves

© Katalin Kedves© Katalin Kedves
© Katalin Kedves© Katalin Kedves

© Katalin Kedves

© Katalin Kedves

Image d’ouverture : © Katalin Kedves

Explorez
Les images de la semaine du 20.01.25 au 26.01.25 : intimité et société
© amos.waits / Instagram
Les images de la semaine du 20.01.25 au 26.01.25 : intimité et société
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye nous livrent autant de récits intimes que de réalités prenant place dans nos...
26 janvier 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Circulation(s) : le festival de la photo émergente de retour en 2025
© Isabella Madrid
Circulation(s) : le festival de la photo émergente de retour en 2025
Circulation(s) est de retour en 2025 avec une sélection de 23 artistes représentant la richesse de la photo émergente. Cette année, le...
24 janvier 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Jean Ranobrac : des imaginaires queers iconiques
© Jean Ranobrac
Jean Ranobrac : des imaginaires queers iconiques
Jean Ranobrac est artiste et photographe. Magicien de la retouche, il est connu pour ses univers queers déjantés. Après avoir arpenté les...
22 janvier 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Sony World Photography Awards : la photographie à la fleur de l'âge
© Thapelo Mahlangu, South Africa, Shortlist, Student Competition, Sony World Photography Awards 2025
Sony World Photography Awards : la photographie à la fleur de l’âge
Les Sony World Photography Awards annoncent les finalistes de ses deux compétitions célébrant les jeunes photographes à travers le monde...
21 janvier 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 20.01.25 au 26.01.25 : intimité et société
© amos.waits / Instagram
Les images de la semaine du 20.01.25 au 26.01.25 : intimité et société
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye nous livrent autant de récits intimes que de réalités prenant place dans nos...
26 janvier 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
La RATP invite Fisheye à célébrer l’année de la mer dans son réseau métropolitain
© Julia Gat
La RATP invite Fisheye à célébrer l’année de la mer dans son réseau métropolitain
Pour la troisième année consécutive, la RATP a convié Fisheye à exposer les photographies de talents émergents dans les stations de son...
25 janvier 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Circulation(s) : le festival de la photo émergente de retour en 2025
© Isabella Madrid
Circulation(s) : le festival de la photo émergente de retour en 2025
Circulation(s) est de retour en 2025 avec une sélection de 23 artistes représentant la richesse de la photo émergente. Cette année, le...
24 janvier 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Delphine Gatinois capture les feux de la vallée de Thann
© Delphine Gatinois
Delphine Gatinois capture les feux de la vallée de Thann
Fruit d’une résidence dans la vallée du Thann, en Alsace, la série Passer l’hiver de Delphine Gatinois s’attache à documenter la...
24 janvier 2025   •  
Écrit par Hugo Mangin