Les coups de cœur #420

19 décembre 2022   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les coups de cœur #420

Nos coups de cœur #420, Lorie Balandreau et Evantias Chaudat font rimer narration et technique. L’une creuse dans le grain des images pour en extraire le mystère, et l’autre joue de la matérialité de l’argentique pour unir les écosystèmes.

Lorie Balandreau

Née en 2001, Lorie Balandreau se souvient avoir pris sa première photographie alors qu’elle n’avait que trois ans. Une image floue réalisée avec le boîtier de sa grand-mère. Depuis, elle développe une démarche obsessive, nourrie par sa curiosité, sa soif de recherche et ses questionnements intérieurs. « Je décrirais mon interprétation comme poétique et agitée. L’art en général est une façon de parler de soi, de s’exprimer, de se découvrir et se montrer sans avoir l’air trop égocentrique. Ce qui m’intéresse dans ce médium, c’est sa bidimension. Le grain et la coupure par le cadre qui lui sont spécifiques », raconte-t-elle. Dans la série Voir Vouloir, l’autrice cherche à créer des narrations qui lui sont propres, à démanteler le monde de manière singulière. Observant uniquement le monde depuis son capteur, elle saisit des images de fenêtres éclairées réalisées de nuit, dont elle prélève ensuite des fragments. Entre voyeurisme et abstraction, ces sources de lumière révèlent des silhouettes anonymes comme des nuanciers colorés. Un ensemble énigmatique jouant avec nos émotions et attisant notre imaginaire. « Le processus de postproduction est aussi important que la photographie initiale, poursuit-elle. Il creuse dans l’image, jusqu’aux pixels. Il est le dernier espoir de voir plus. Les images nocturnes deviennent ainsi très bruyantes, ce qui pose un filtre, comme une frontière entre le regard et le sujet. » Une frontière qu’il nous est libre d’abolir, en complétant à notre guise les lacunes visuelles qui s’offrent à nous…

© Lorie Balandreau© Lorie Balandreau
© Lorie Balandreau© Lorie Balandreau
© Lorie Balandreau© Lorie Balandreau

© Lorie Balandreau

Evantias Chaudat

« La notion de vivant est au centre de mon travail. Plus particulièrement les liens qui unissent vivant et non-vivant. Animal, minéral, eau, humain, lumière, végétal s’entremêlent pour en dévoiler les résonances intimes de l’infiniment petit à l’infiniment grand »,

déclare Evantias Chaudat. Diplômée de la Haute École des Arts du Rhin, la photographe et vidéaste développe, à l’argentique, une œuvre appliquée, croisant les différentes espèces qui habitent notre Terre. « J’aime l’acuité de cette technique, le fait d’avoir un nombre de prises limité, de ne pas voir immédiatement l’image implique un rapport au temps et un engagement particuliers. On doit faire face à des choix conscients et radicaux », poursuit-elle. En juin 2022, l’artiste séjourne trois semaines en Namibie – un pays sec, peu peuplé qui la fascine. Car si les humains semblent avoir déserté le territoire, sa biodiversité, elle, demeure extrêmement riche. « Le terme namib signifie “zone où il n’y a rien”, dans la langue des Khoïkhoïs, l’un des tous premiers peuples d’Afrique australe. Mais sur place on ne peut qu’être frappé·e par le fait que le pays est au contraire pleinement habité, loin de ce néant qui lui donne son nom », précise Evantias Chaudat. Pensée comme un dialogue, une danse entre les éléments ponctuant cette terre, Namib entend rendre hommage à cette discrète diversité. Comme une célébration des résonances qui rallient les êtres. Une osmose bienfaitrice dont on ne peut que se délecter.

© Evantias Chaudat© Evantias Chaudat
© Evantias Chaudat

© Evantias Chaudat

Image d’ouverture : © Lorie Balandreau

Explorez
La sélection Instagram #483 : vent glacial
© Kim Kkam / Instagram
La sélection Instagram #483 : vent glacial
La première neige de la saison est tombée. Le froid s’installe doucement dans notre sélection Instagram de la semaine. Les artistes...
03 décembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Charles Xelot et les marins qui se confrontent à l'Arctique
© Charles Xelot
Charles Xelot et les marins qui se confrontent à l’Arctique
Spécialisé dans les environnements extrêmes depuis une dizaine d’années, Charles Xelot a longtemps travaillé sur les changements de...
26 novembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dans l’œil de Sophie Alyz : les raisons qui font vriller un clocher
© Sophie Alyz
Dans l’œil de Sophie Alyz : les raisons qui font vriller un clocher
Cette semaine, plongée dans l’œil de Sophie Alyz. Dans Les Atomes à coquille, une série actuellement présentée au festival Planches...
25 novembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Chaumont-Photo-sur-Loire, une 7ᵉ édition où la  poésie tutoie l'engagement écologique
Décolorisation, 2024 © Letizia Le Fur, courtesy Galerie Julie Caredda – Paris
Chaumont-Photo-sur-Loire, une 7ᵉ édition où la poésie tutoie l’engagement écologique
Sur les bords de Loire, dans l’idyllique domaine du château de Chaumont-sur-Loire, se sont installées cinq expositions qui célèbrent la...
23 novembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Mame-Diarra Niang : photographe de l'évanescence
© Mame-Diarra Niang
Mame-Diarra Niang : photographe de l’évanescence
Remember to Forget, à la Fondation Henri Cartier-Bresson, est la première monographie française de Mame-Diarra Niang. Dans ses séries...
Il y a 1 heure   •  
Écrit par Costanza Spina
Paris 2024 : Terrain de jeux pour les photographes
Sarah Aubel / Paris2024
Paris 2024 : Terrain de jeux pour les photographes
De l’émotion, du sport, un moment historique. Trois des 15 photographes commissionné·es par Fisheye Manufacture pour couvrir les Jeux de...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Rebecca Topakian : le destin revisité de Dame Gulizar
Dame Gulizar and other love stories © Rebecca Topakian
Rebecca Topakian : le destin revisité de Dame Gulizar
Jusqu'au 21 décembre 2024, dans le cadre de PhotoSaintGermain et de Un Week-end à l'est 2024, Rebecca Topakian, photographe...
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Sarah Moon inaugure le nouveau rendez-vous de Chanel autour de la création des images
© Sarah Moon
Sarah Moon inaugure le nouveau rendez-vous de Chanel autour de la création des images
À compter du 5 décembre 2024, le 7 à 9 de Chanel se tiendra tous les deux mois au Jeu de Paume. Gracieusement ouvert à toutes et à...
04 décembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet