Frédéric Murarotto et Benjamin Achour, nos coups de cœur de la semaine, offrent d’autres perspectives aux sujets qu’ils immortalisent. Le premier conçoit une nouvelle imagerie de la montée des marches du Festival de Cannes quand le second montre les complexes hôteliers inachevés du désert du Sinaï.
Frédéric Murarotto
Journaliste et photographe pour le monde de la culture, et en particulier celui du cinéma, Frédéric Murarotto ne cesse de développer son propre style et son univers. Ses images se présentent à nous « picturales et teintées d’humour, artistiques ou burlesques », ainsi qu’il les décrit lui-même, « croisant lumières chaudes et scènes insolites pour vous happer dans (s)a cinématographie du quotidien », poursuit-il. Dans Red (ghosts) Carpet, une série de photos prises lors d’une montée des marches au Festival de Cannes, on retrouve cette perception décalée et absurde du monde qu’il revendique, exagérant le flux continu de figures célèbres ou anonymes entremêlées. Apparaissant en costumes, robes et talons aiguilles, aucune d’entre elles n’est reconnaissable, car prises dans un tourbillon qui tournoie puis s’évapore presque simultanément. Frédéric Murarotto, en recherche ici d’une esthétique novatrice de l’« anti-Instagram », éveille nos esprits et attire notre attention sur une certaine comédie, celle de l’éphémère mercantile.
Benjamin Achour
« Mon travail cherche à montrer les conséquences de la guerre sur le paysage. Il vise à rendre visible ce que l’on a tendance à ignorer car abîmé ou dégradé », explique Benjamin Achour. C’est à la suite d’un voyage dans le désert du Sinaï que cet ancien étudiant de l’ENS Louis Lumière décide de réaliser un projet sur ce territoire disputé. Alors qu’il était occupé par une population bédouine pour l’essentiel, l’Arabie Saoudite et l’Égypte souhaitaient la transformer en zone d’échanges et de tourisme leur profitant. « Cependant, la révolution égyptienne et l’implantation de Daesh dans le nord du Sinaï ont participé à l’instabilité de la région et ont fait fuir les investisseurs », explique le photographe parisien. Au fil de ses images se découvrent ainsi les vestiges de complexes hôteliers inachevés, qui peuplent désormais une large portion de cet espace. « Cette série explore une région soumise à de nombreuses tensions. Terre biblique, très peu habitée, elle est devenue un champ de ruines contemporain », conclut-il.