Éloi Ficat et Vincent Binant, nos coups de cœur de la semaine, nous emmènent dans leur promenade lyrique à travers les paysages perdus et les maisons ensoleillées. D’un instant insignifiant à un moment contemplatif, les deux photographes s’attardent sur de douces textures qui dessinent les contours poétiques de leurs images.
Éloi Ficat
« J’aime l’idée de faire des photos qu’on aurait envie de rejoindre, qu’elles nous donnent envie de rêver et de faire partie du cadre, des photos où l’œil des spectateur·ices navigue entre le réel et l’irréel », soutient Éloi Ficat, photographe et chef opérateur dans l’audiovisuel. Pour celui qui a commencé la photographie au lycée sous la forme d’un jeu de recherche de textures, le médium s’est avéré être un puits d’inspiration autant pour ses projets professionnels dans le cinéma que personnels. « Je m’attache aux lumières, aux mouvements et aux décors dans mes images comme dans mes plans de caméra », confie-t-il. À la contemplation de ses clichés, on ressent l’air marin, les grains de sables des plages et la douceur des draps étendus sur le lit. Des paysages, des horizons, des maisons qui prennent la chaleur sous les rayons du Midi, Éloi Ficat capture des instants de vie et des moments du quotidien. « La nature est, par excellence, notre premier réservoir de matières. Elle nous propose des éléments bruts, non transformés, qui m’inspirent beaucoup. Mais je constate que je recherche de plus en plus la présence humaine et notre expérience de la matière », déclare l’artiste. La texture délicate émane d’une utilisation d’objectifs argentiques datant des années 1950, qui pour certains présentent quelques défauts d’optiques. « J’aime le charme de cette netteté vaporeuse qu’ils me permettent d’obtenir et qui vient nourrir le caractère pictural de mes photos », conclut-il.
Vincent Binant
Lors d’un voyage d’Istanbul à Ankara en septembre 2024, le photographe Vincent Binant a composé un récit de fiction qui respire la contemplation. Cette expédition solitaire se dévoile sur des photographies emplies de mélancolie et de poésie de sa série Canım. « C’est histoire d’une déambulation lente au travers de paysages désertiques jusqu’aux abords d’un vieil hôtel perdu et entouré de grandes étendues », raconte-t-il. Une route éloignée sillonne les vastes plaines, un bateau vogue sur des flots tranquilles, une jeune femme fait danser délicatement ses doigts sur un piano dans un salon désuet. Les images de l’artiste s’accompagnent de ses pensées : « Un vieil hôtel se dresse en retrait, vestiges d’une époque révolue, refuge isolé au milieu de nulle part qui semble germer comme un mirage », écrit-il. À la recherche constante d’esthétisme et de narration, Vincent Binant sculpte de son regard constitué de lyrisme et d’abstraction « les détails du quotidien, les souvenirs et les espoirs oubliés », détaille-t-il. Il les transforme en une prose actancielle où l’insignifiant devient une évidence.