Margaux Battistelli et Ludwig Favre, nos coups de cœur de la semaine, investissent la rue et brossent des portraits poétiques de différentes villes du monde. La première arpente le Japon à la recherche d’instants et d’émotions, tandis que le second, dans une esthétique cinématographique à la Wes Anderson, célèbre New York et sa population.
Margaux Battistelli
« La rue est une scène où la vie se déploie dans sa forme la plus brute et la plus authentique. C’est une toile d’émotions, d’interactions et d’instants fugaces qui racontent des histoires singulières », plaide Margaux Battistelli, directrice artistique et photographe. Évoluant avec un appareil photo dans les mains depuis l’enfance, elle est frappée par ce qu’elle appelle « déclic artistique » en 2008 lorsqu’elle visite pour la première fois le Japon, un pays qui va profondément la marquer par « sa beauté et sa grande photogénie ». Un vieillard fume une cigarette, un néon rose sculpte le visage d’une jeune femme sirotant un café. Avec délicatesse, l’autrice unit son regard documentaire avec une approche personnelle. « Je ne cherche pas à figer le réel tel qu’il est, ni à le déguiser en ce qu’il n’est pas. J’aspire plutôt à le “sublimer”, à métamorphoser des instants parfois “anodins” en images uniques », soutient-elle. S’inspirant des couleurs de Saul Leiter, Margaux Battistelli dépeint un Japon lumineux, granuleux, presque impermanent. « Chaque coin de rue, chaque ombre, chaque passant·e porte en lui·elle un récit singulier, qui attend d’être immortalisé », conclut-elle avec douceur.
Ludwig Favre
I **** New York. Voilà le titre étonnant de la série de Ludwig Favre. « Cela peut être interprété de multiples façons, détaille le photographe, qu’il s’agisse de “I Love New York” ou de “I Hate New York”, car cette ville suscite des émotions fortes : certain·es l’admirent profondément, tandis que d’autres la trouvent accablante. » Spécialisé dans la photographie urbaine, il compose des images uniques aux teintes cinématographiques, s’inspirant des réalisateur·ices comme Wes Anderson, Ridley Scott ou Stanley Kubrick. « J’ai une admiration pour l’Amérique fantasmée, vue à travers le cinéma et la photographie. Cela a eu une influence majeure sur ma vision artistique et alimente mon désir d’explorer les villes et les paysages de ce territoire à ma manière », confie-t-il. À travers ce travail, l’auteur rend hommage à la Grosse Pomme dans une esthétique pastel. Il saisit les bâtiments, leurs interactions avec celles et ceux qui les habitent, les larges rues aux allures américaines et les symboles de cette métropole qui ne dort jamais – la statue de la Liberté, la rivière Hudson, Manhattan. « New York est un lieu qui se réinvente constamment tout en restant emblématique. Ici, j’ai voulu capturer le dynamisme de la ville, sa beauté architecturale et la façon dont la lumière transforme son paysage urbain. Je me suis concentrée sur des scènes qui évoquent la nostalgie tout en étant modernes, en mélangeant des perspectives classiques avec des angles inattendus », conclut Ludwig Favre avec douceur et nostalgie.