Les dérives des fraternités

30 octobre 2018   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les dérives des fraternités

Lorsque son frère entre dans une fraternité américaine, le photographe Andrew Moisey découvre un univers secret. Pendant sept ans, il capture le quotidien de ces hommes, et signe The American Fraternity, un ouvrage effrayant et fascinant.

Durant sept ans, Andrew Moisey a documenté l’univers secret des fraternités américaines. Non mixtes, ces organisations fraternelles sont très courantes en Amérique du Nord. Si elles permettent une intégration aisée dans le monde universitaire, les fraternités sont également réputées pour leurs épreuves d’intégrations et leurs coutumes controversées.

« Je prenais mon boîtier avec moi à chaque fois que j’allais rendre visite à mon frère », raconte Andrew. « Puis, quelques années plus tard, j’ai appris que cette fraternité avait fermé. Lorsque je m’y suis rendu, la porte était grande ouverte – comme si un ouragan avait tout bousculé. Je suis entré dans une salle secrète, qui m’était jadis interdite.Sur le sol, j’ai trouvé un livre rassemblant des rites ». Objet à la fois profane et sacré, ce livret fascine Andrew, qui décide de l’utiliser comme pilier de son projet photographique. Le concept de son ouvrage naît alors : un récit moderne encastré dans ce journal secret, preuve des dérives des fraternités.

© Andrew Moisey© Andrew Moisey

Un serment de pureté

« Je crois que les fraternités sont à la fois belles et fondamentalement mauvaises »,

déclare Andrew. Ces organisations non mixtes existent aux États-Unis depuis près de 200 ans, et ont formé un grand nombre d’hommes politiques. Alors que la présidence de Donald Trump, et le mouvement #MeToo déchaînent les réseaux sociaux, Andrew estime qu’il devient essentiel de mettre en lumière ces traditions ancestrales. Les dernières pages de The American Fraternity dévoilent d’ailleurs des noms d’hommes reconnus aux États-Unis, appartenant à ces cercles restreints. « Les gens ne savent pas qu’autant de leaders américains en font partie », précise-t-il. « En publiant leurs noms dans cet ouvrage, j’espère aider la société à mieux comprendre le passé et l’avenir de ces personnes »

En parcourant The American Fraternity, le lecteur pourra découvrir de jeunes hommes s’amusant, euphoriques et libres. À leurs côtés, plus glaçants, se trouvent des clichés de nouveaux venus humiliés, de femmes allongées inconscientes sur des lits, ou encore des paroles de chansons évoquant des abus sexuels. Une représentation de la masculinité toxique dans laquelle évoluent les membres de ces sociétés. Reflet d’un monde dans lequel les limites se brouillent et s’effacent, au profit de la camaraderie. Un comportement dissimulé derrière un serment de pureté que les membres déclament en entrant dans la fraternité. « Je souhaitais mettre en avant ce serment. C’était marquant : découvrir que la culture masculine la plus mal vue du pays ait un discours aussi intègre ».

Sombre et intime, The American Fraternity révèle les travers de ces organisations masculines. Un ouvrage dans lequel liberté et danger se mélangent. « La sauvagerie est magnifique, jusqu’à ce qu’elle blesse », conclut Andrew.

The American Fraternity, Éditions Daylight Books, 45€, 144 p.

© Andrew Moisey

© Andrew Moisey© Andrew Moisey

© Andrew Moisey

© Andrew Moisey© Andrew Moisey

© Andrew Moisey© Andrew Moisey

© Andrew Moisey

© Andrew Moisey

Explorez
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
© Simon Vansteenwinckel
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
Le nom du lauréat de la 71e édition du prix Nadar Gens d’images vient d’être annoncé : il s’agit de Simon Vansteenwinckel. Le jury l’a...
06 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
a ppr oc he : Rencontre au cœur de l’image
© Emile Gostelie
a ppr oc he : Rencontre au cœur de l’image
Dans cet espace pensé comme une exposition, un·e photographe et un·e commissaire croisent leurs regards. Pour cette première édition...
06 novembre 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Fisheye #74 sonde la notion d’éthique en photographie
© Stan Desjeux
Fisheye #74 sonde la notion d’éthique en photographie
Fisheye #74 sera disponible en kiosque ce samedi 8 novembre ! En ce mois consacré à la photographie, notre nouveau numéro s’intéresse à...
06 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Laura Menassa : Beyrouth comme corps et paysage
© Laura Menassa
Laura Menassa : Beyrouth comme corps et paysage
Entre journal intime visuel et témoignage collectif, le travail de Laura Menassa explore la fragilité et la résilience au cœur de...
04 novembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Nos derniers articles
Voir tous les articles
L’intimité au cœur de Planches Contact Festival 2025
© Carline Bourdelas / Planches Contact Festival
L’intimité au cœur de Planches Contact Festival 2025
Jusqu’au 4 janvier 2026, la 16e édition de Planches Contact Festival anime Deauville et propose une diversité de regards sur un même...
À l'instant   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Laura Lafon Cadilhac : s'indigner sur les cendres de l'été
Red Is Over My Lover. Not Anymore Mi Amor © Laura Lafon Cadilhac
Laura Lafon Cadilhac : s’indigner sur les cendres de l’été
Publié chez Saetta Books, Red Is Over My Lover. Not Anymore Mi Amor de Laura Lafon Cadilhac révèle un été interminable. L’ouvrage se veut...
07 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Écofemmes Fest : un rendez-vous pour créer, lutter, transmettre
Trenza, le lien qui nous unit, 2025 ©Gabriela Larrea Almeida
Écofemmes Fest : un rendez-vous pour créer, lutter, transmettre
Jusqu'au 9 novembre prochain, La Caserne, dans le 10e arrondissement de Paris, accueille la première édition d’Écofemmes Fest, un...
07 novembre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
© Simon Vansteenwinckel
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
Le nom du lauréat de la 71e édition du prix Nadar Gens d’images vient d’être annoncé : il s’agit de Simon Vansteenwinckel. Le jury l’a...
06 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet