Les paysages de l’esprit de Claudia Corrent

21 août 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les paysages de l’esprit de Claudia Corrent

Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. La photographe Claudia Corrent mélange images d’archive et paysages contemporains. Une façon pour elle de construire un monde imaginaire idéal.

Après avoir étudié la philosophie à l’université, Claudia Corrent, photographe italienne de 39 ans, plonge dans le 8e art. « Pour être honnête, je suis intéressée par ce média depuis le jour où mon père a rapporté un boîtier à la maison, lorsque j’étais adolescente. J’ai toujours été fascinée par les images, et je me souviens que je réarrangeais sans cesse les clichés de nos albums de famille lorsque j’étais jeune », se souvient-elle.

D’abord intéressée par les reportages, l’artiste s’est ensuite tournée vers la photographie de paysage et d’archive. Deux esthétiques qu’elle fusionne grâce à une vision profondément humaniste. Dans Per te, per ricordarti spesso (Pour toi, pour que tu te souviennes souvent d’elle), un projet hybride, mêlant passé et présent, symbolisme et réalisme, Claudia Corrent place ses sujets dans un environnement intemporel. « Tout a commencé lorsqu’on m’a confié les photographies d’une femme nommée Mirta, née dans les années 1920 à Trento, à quelques kilomètres de chez moi » raconte l’artiste. En parallèle, l’auteure collectait des clichés d’une petite fille appelée Doris. Des trésors qu’elle dénichait dans des marchés aux puces. « Sans connaître ces femmes, je pouvais deviner des bribes de leurs vies, imaginer leurs souvenirs en comparant ma vie à la leur », confie l’artiste. Une introspection lui permettant de réunir ces inconnues dans un même récit.

Objets puissants

Trois générations se rencontrent ainsi au cœur de Per te, per ricordarti spesso – une légende inscrite au dos d’une des images récoltées : Mirta et Doris, la tante et le père de Claudia Corrent, puis ses cousines et ses sœurs. Un projet complexe entrelaçant les notions de famille, de mémoire et d’imaginaire. « Il s’agit d’une sorte de paysage de l’esprit. Un panorama qui change en fonction de mon ressenti, de mes émotions », confie l’auteure, qui perçoit les images d’archive comme des créations insensibles au passage du temps. Pour elle, les clichés, loin d’être futiles ou fragiles, deviennent des objets puissants, des icônes existant à leur façon.

Des créations si précieuses qu’elles permettent de refermer les failles du passé. « Cette série provient d’un besoin personnel de mettre à plat certains détails de ma vie. Il y a quelques années, j’ai découvert un concept venu de la culture juive, Tikkun, qui m’a fascinée : cela signifie réparer », explique la photographe. Un voyage dans le temps métaphorique, effaçant les erreurs de son « moi » antérieur. En intervenant sur ces images d’archive, Claudia Corrent invente une vérité alternative et change l’histoire. Elle construit alors un univers où archaïsme et modernité se mêlent, efface les démons de l’avant et imagine un après paisible, idéal et presque palpable.

© Claudia Corrent© Claudia Corrent

© Claudia Corrent© Claudia Corrent

© Claudia Corrent© Claudia Corrent

© Claudia Corrent© Claudia Corrent

© Claudia Corrent

Explorez
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
Couldn’t Care Less de Thomas Lélu et Lee Shulman : un livre à votre image
Couldn't Care Less © Thomas Lélu et Lee Shulman
Couldn’t Care Less de Thomas Lélu et Lee Shulman : un livre à votre image
Sous le soleil arlésien, nous avons rencontré Lee Shulman et Thomas Lélu à l’occasion de la sortie de Couldn’t Care Less. Pour réaliser...
11 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
La sélection Instagram #523 : loup y es-tu ?
© Ecaterina Rusu / Instagram
La sélection Instagram #523 : loup y es-tu ?
Photographier signifie souvent montrer, dévoiler, révéler. Pourtant, il arrive que ce qui se trouve de l’autre côté de l’objectif ne...
09 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Simon Baker quitte la direction de la Maison européenne de la photographie
© Marguerite Bornhauser
Simon Baker quitte la direction de la Maison européenne de la photographie
Ce lundi 8 septembre 2025, la Maison européenne de la photographie a annoncé le départ de Simon Baker, son directeur, après sept années...
08 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ekaterina Perfilieva et l'intime au cœur de la fracture
© Ekaterina Perfilieva, Nocturnal Animals
Ekaterina Perfilieva et l’intime au cœur de la fracture
À la fois distante et profondément engagée, Ekaterina Perfilieva, artiste multidisciplinaire, interroge une contemporanéité...
17 septembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
5 coups de cœur qui témoignent d'un quotidien
I **** New York © Ludwig Favre
5 coups de cœur qui témoignent d’un quotidien
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
15 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet