Installée entre New York et l’Italie, Lucia Buricelli transforme les scènes les plus quelconques en tableaux colorés et fantasques. La photographe vénitienne, amoureuse des surprises qu’offre la rue, raconte son monde avec humour, curiosité, et un sens aiguisé de l’instantanéité.
Originaire de Venise, Lucia Buricelli s’est initiée au médium lorsqu’elle était au lycée, entre les ruelles étroites de sa ville natale. « Pendant longtemps, la photographie de rue était le seul type de photographie que je connaissais, et Venise était l’endroit idéal pour cela. Car tout ce qui vous entoure ressemble à une image », déclare-t-elle. Depuis, son objectif s’est posé sur le bitume new-yorkais et partout où le hasard se transforme en scènes captivantes. « Attirée par tout ce qui éveille [son] attention », l’artiste collectionne les instants singuliers, absurdes, parfois tendres, avec une composition toujours saisissante. En puisant dans le réel pour créer un « désordre coloré », Lucia Buricelli construit son œuvre comme une archéologue du présent. Un raton laveur amateur de soda, un chat marin ou encore des goélands envahissants, les animaux ont une place importante dans son travail. « J’aime aussi explorer la politique, le comportement humain et l’observation sociale », ajoute-t-elle. Fascinée par la façon dont les espaces urbains et la vie quotidienne évoluent au fil du temps, elle transforme la ville en un théâtre, une galerie à ciel ouvert et un laboratoire visuel. « Je pense que la photographie de rue revient à construire l’histoire visuelle d’une ville et de ses habitant·es », résume Lucia Buricelli.
Sous le bitume, la couleur
Avec Lucia Buricelli, tout commence souvent par une promenade, une déambulation guidée par la curiosité. Et si ses images frappent, c’est notamment grâce à son usage assumé de la couleur et du flash, qui transforment les scènes banales en visions éclatantes. Elle explique : « Pour moi, la couleur devient de plus en plus un moyen de filtrer et de composer le monde. C’est un outil narratif, un moyen de mettre les choses en valeur. » Que ce soit en hiver ou en été, sa palette, souvent vive et saturée, donne à ses clichés une énergie immédiate, comme si la réalité y gagnait une dimension presque fictive. L’humour est également très présent, parfois discret, parfois évident, toujours sincère. « Je capture ce qui attire mon attention. Certaines choses me font rire, d’autres me mettent en colère, d’autres encore m’échappent… », confie la photographe. L’ambiguïté est permise, l’interprétation ouverte. Ce qui compte, c’est ce frisson de surprise qui traverse ses compositions. Récemment, Lucia Buricelli a décidé de quitter New York, après plus de cinq ans d’errance visuelle, pour retourner en Italie. Une nouvelle page à écrire, peut-être moins frénétique, mais toujours habitée par ce même appétit d’images. Car, en Europe ou aux États-Unis, l’artiste n’a pas fini de faire parler les rues. Et, comme elle le dit elle-même, « n’oubliez pas de lever les yeux ».