Murmure à l’oreille des chevaux

03 août 2016   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Murmure à l'oreille des chevaux
Diplômée de l’école d’Art de Marseille puis de l’école de photographie de Vevey, Mathilde Magnée, 27 ans, vit depuis plus d’un an en Australie. Elle a tout quitté pour de nouvelles expériences. C’est ainsi qu’elle c’est retrouvée à travailler dans un élevage de chevaux, comme il en existe de nombreux dans le pays. Ce qui lui a inspiré cette belle série documentaire, toujours en cours : “Thoroughbreds”.

Fisheye Magazine : Pourquoi es-tu devenue photographe ?

Mathilde Magnée : J’éprouve de la satisfaction à créer des images. Et la photographie m’épanouit plus que la peinture. Travailler sur des projets photo me passionne, et me donne une certaine crédibilité je crois. Par contre je n’en vis pas et je pense que c’est pour le mieux. Je ne me vois pas répondre à des commandes alors je suis moi-même submergée par mes propres idées et désirs.

Quelles sont tes inspirations ?

Shana Moulton, Apichatpong Weerasethakul, Harmony Korine… Beaucoup de cinéastes ou bien d’artistes utilisant la vidéo en fait ! Sinon en photographie, mes héros sont Bill Henson, Jeff Wall, Paul Graham, Antoine d’Agata, Justine Kurland.

Comment définirais-tu ton approche de la photographie ?

Cinématographique et sculpturale ! En ce moment, c’est un rapport très souple. Je ne sors pas mon appareil à n’importe quelle occasion, mais je laisse portée par un moment qui me touche, un visage… Tout en réfléchissant à la matière que je pourrais apporter pour que ça ait et donne du sens à mon projet.

Extrait de "Thoroughbreds", © Mathilde Magnée
Extrait de “Thoroughbreds”, © Mathilde Magnée

Qu’as-tu cherché à travers ta série en cours, « Thoroughbreds » (en français, “pur sang”) ?

Avant tout mon expérience dans ce milieu. Mais aussi mes interrogations sur sur le contrôle des êtres vivants, la coexistence entre l’amour que porte les éleveurs envers l’animal et son exploitation. La valeur de l’héritage, des traditions.

C’est une série très différente de tes travaux précédents, plus sombres et plus abstraits. Pourquoi ?

Ces dernières années, j’avais pour habitude de travailler en studio. Je faisais beaucoup de portraits et de natures mortes sur fonds noir avec des lumières travaillées. J’avais un style définis sur lequel je me reposais. Peu après la fin de mes études en Suisse, j’ai décider de partir à l’autre bout du monde avec un appareil photo argentique petit format et sortir de ma zone de confort. Je travaille maintenant sur le terrain, à l’argentique en lumière naturelle et même sans trépied ! Il y a néanmoins des liens, je pense, avec mes précédents travaux : mon rapport au portrait, une affection pour les animaux… Et j’accorde toujours autant d’attention aux lumières afin d’élaborer une atmosphère.

Qu’est-ce qui te plaît dans la photographie documentaire ?

Le fait d’être en rapport direct avec le réel, tout en créant une vision unique. L’expérience vécue et les choix à faire pour retranscrire au mieux la réalité.

Tu retournes régulièrement en Australie, du coup ? En tant que photographe, quelles sont tes affinités avec ce pays et ses habitants?

Je suis en Australie depuis un ans et demi. Peu de gens me considère comme photographe ici. Pour eux je suis plutôt une globe-trotteuse ou “horse person” (en français, “une amoureuse des chevaux”). Ce qui est bien dans ce pays, c’est que les gens sont très détendus. Par exemple, dans le milieu de la course, on sait vaguement que je poursuis un projet photo mais on me laisse aller et venir sans problème.

Quelle est ton image préférée de la série et pourquoi ?

L’image qui a beaucoup de sens pour moi : celle de la triple exposition de chevaux dans la brume. C’est peut-être la plus abstraite. Elle exprime ce qui se passait dans ma tête durant mes premières semaines dans cet élevage. Il y avait 300 chevaux a nourrir deux fois par jours ! À la fin de la journée, je fermais les yeux et je voyais tous ces chevaux sortant du brouillard et venir à moi.

MathildeMagnee_08MathildeMagnee_09MathildeMagnee_01MathildeMagnee_02MathildeMagnee_03MathildeMagnee_04MathildeMagnee_05MathildeMagnee_07MathildeMagnee_10

Propos recueillis par Marie Moglia

En (sa)voir plus

→ Découvrez tout le travail de Mathilde sur son site : www.mathildemagnee.com

Explorez
Antoine Boissonot sur sa Loire intérieure
L'eau du fleuve parle à celui qui écoute © Antoine Boissonot
Antoine Boissonot sur sa Loire intérieure
Antoine Boissonot embarque sur la Loire à bord d’un canoë pour un voyage photographique introspectif. Se laissant porter sur l’eau...
07 mai 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Issei Suda, chroniqueur d’un Japon entre deux mondes
© Issei Suda
Issei Suda, chroniqueur d’un Japon entre deux mondes
Le Centre de la photographie de Mougins présente, jusqu'au 8 juin 2025, une exposition sur le photographe japonais iconique Issei Suda.
29 avril 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
© Stefan Dotter
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
Photographe allemand installé à Tokyo, Stefan Dotter signe, avec Women of the Sea, une immersion sensible au cœur d’une tradition...
25 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
© Alice Quaresma
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
L’année 2025 est marquée par la saison France-Brésil. Ce programme a pour ambition de renforcer les liens entre les deux pays en nouant...
23 avril 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 5 mai 2025 : révolution des corps
© Anouk Durocher
Les images de la semaine du 5 mai 2025 : révolution des corps
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages Fisheye célèbrent les corps sous différentes formes, de sa portée politique aux...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Sony World Photography Awards 2025 : Photographier le déni, documenter les résistances
The Journey Home from School © Laura Pannack, United Kingdom, Winner, Professional competition, Perspectives, Sony World Photography Awards 2025.
Sony World Photography Awards 2025 : Photographier le déni, documenter les résistances
Des corps qui chutent, des trajectoires contrariées, des espaces repris de force… Et si la photographie était un langage de reconquête ?...
10 mai 2025   •  
Écrit par Anaïs Viand
Marion Gronier, la folie et le regard
© Marion Gronier, Quelque chose comme une araignée / Courtesy of the artist and Prix Caritas Photo Sociale
Marion Gronier, la folie et le regard
Pendant deux ans, Marion Gronier a arpenté des institutions psychiatriques en France et au Sénégal. Sans jamais montrer de visages, elle...
09 mai 2025   •  
Écrit par Milena III
Anouk Durocher : portrait d'une révolution intime
© Anouk Durocher
Anouk Durocher : portrait d’une révolution intime
Nous avons posé quelques questions à Anouk Durocher, artiste exposée à Circulation(s) 2025. Dans son travail, elle explore l'approche...
08 mai 2025   •  
Écrit par Costanza Spina