Publié par le Musée de l’Élysée, l’ouvrage Prix Élysée présente les projets de huit nommés. Un livre « making-of », révélant le processus de création de photographes inspirés.
Créé en 2014, le Prix Élysée accompagne huit nommés dans l’élaboration d’un projet inédit. Un soutien singulier à la production photographique. Parmi plus de 300 candidats, Laia Abrila, Mathieu Asselin, Claude Baechtold, Alexandra Catiere, Alinka Echeverría, Gregory Halpern, Nicola Lo Calzo et Luis Carlos Tovar se sont démarqués. Ces artistes ont reçu 5000 CHF (soit environ 4400 euros) afin de démarrer un nouveau projet. Une carte blanche dont les premières ébauches sont publiées dans Prix Élysée, le livre des nominés. Un ouvrage collectif, présentant les projets des finalistes. Photographies, maquettes, notes d’intentions, schémas et images préparatoires remplissent les pages du livre et invitent le lecteur à se plonger dans l’envers du décor : le processus de création.
Si chaque projet illustre la créativité des différents auteurs, des thématiques communes se dévoilent, donnant à voir des œuvres inspirées par la société, l’histoire ou encore l’intime. Gregory Halpern et Nicola Lo Calzo documentent des problématiques politiques, entre esthétisme et originalité. Alinka Echeverría et Alexandra Catiere explorent d’anciens procédés photographiques, tandis que Luis Carlo Tovar et Claude Baechtold interrogent l’absence au sein de la famille. Enfin Laia Abril et Mathieu Asselin s’intéressent tous deux à la maladie, sa psychologie, ses origines et ses répercussions sur notre société.
© Claude Baechtold
Dissiper les préjugés
Ancienne journaliste, Laia Abril s’est lancé, depuis quelques années, dans un projet au long cours, intitulé A History of Misogyny. Après avoir révélé un premier chapitre au public, On Abortion, elle développe désormais On Mass Hysteria. « Je pense qu’il ne s’agit pas d’un nouveau chapitre, mais bien d’une genèse. Je suis convaincue que certains éléments de cette condition peuvent expliquer l’origine de la misogynie », confie l’artiste. Dans l’ouvrage, elle présente le cas de Chalco : 600 adolescentes ont soudainement perdu la capacité de marcher debout, dans un pensionnant catholique du Mexique, en 2007. « L’hystérie de masse se présente comme une réaction aux circonstances dans lesquelles les femmes subissent un stress extrême, se sentent réprimées, ou forcées », explique Laia Abril. Une réaction corporelle se produisant lorsque les mots ne suffisent plus. Dans On Mass Hysteria, la photographe illustre les rêves et les peurs des jeunes pensionnaires. Une représentation métaphorique et poignante de la répression subie par ces femmes.
À travers HIV Timeline, Mathieu Asselin documente, quant à lui, les origines, migrations, diffusions et mutations du virus du SIDA. « Mon objectif était de fusionner les aspects scientifiques et humains du récit en une seule vision artistique. Un travail qui serait clair et factuel, tout en proposant une nouvelle représentation esthétique de l’histoire de ce virus », explique le photographe. En utilisant plusieurs médiums – photographies, archives ou encore textes – Mathieu Asselin tente d’effacer la peur entourant cette maladie, au profit du dialogue. Divisée en chapitres, son œuvre retrace la naissance du SIDA, depuis le patient zéro jusqu’aux dernières avancées scientifiques. « Nous devrions désormais nous interroger : comment pouvons-nous éduquer les nouvelles générations, les avertir des dangers de ce virus, tout en les tenant au courant des progrès technologiques ? » précise l’auteur. Un travail complexe et nécessaire.
En se penchant sur l’histoire de deux maladies inspirant la crainte, Laia Abril et Mathieu Asselin tentent de dissiper les préjugés entourant ces conditions. Une manière originale de soulever d’importantes questions : d’où viennent ces épidémies ? Comment sont-elles perçues aujourd’hui ? N’est-il pas temps de poser un nouveau regard sur ces pathologies ?
Prix Élysée, publié par le Musée de l’Élysée, 36 euros, 136 p.
© à g. Mathieu Asselin, à d. Alexandra Catiere
© Luis Carlos Tovar
© Nicola Lo Calzo
© Laia Abril
© à g. Gregory Halpern à d. Alinka Echevarría
Prix Élysée, page de Laia Abril, © Anthony Rochat
Prix Élysée, page de Mathieu Asselin, © Anthony Rochat