Dans sa série Ambient Pressure, l’artiste Rebecca Najdowski nous invite à interroger le rôle du médium photographique dans notre représentation de la nature. De ses images énigmatiques et expérimentales de paysages transparaît une sourde angoisse, nous rappelant le désastre écologique à venir.
Un vortex nous aspire dans le lit asséché d’une rivière. Une présence ectoplasmique bleutée flotte dans une forêt de bouleaux en hiver. Le ciel est lacéré de toute part dans un paysage de bord de mer. Voici quelques-unes des images qui composent l’étrange univers de Rebecca Najdowski, originaire du Nouveau-Mexique, aux États-Unis, et vivant aujourd’hui à Melbourne, en Australie. Dans son travail, l’artiste pluridisciplinaire utilise aussi bien la vidéo, les diapositives d’archives que la numérisation 3D et l’IA générative, mais la photographie reste son médium de prédilection. « La photographie peut sembler neutre ou transparente, mais elle est en réalité influencée par des considérations idéologiques. Je suis fascinée par son influence et son omniprésence dans notre compréhension du monde », explique-t-elle.
Matérialiser les dommages écologiques en cours
Sa série Ambient Pressure cherche à saper de manière ludique les supports et les structures de représentation des images photographiques de la nature, dont les approches classiques la frustraient. Pour cela, Rebecca Najdowski s’est replongée dans ses archives personnelles d’où elle a extrait des paysages, sans réels intérêts à ses yeux, qu’elle a ensuite transformés. « Je manipule directement les négatifs en les brûlant, en les trouant, en les pliant, par le dessin ou en ajoutant des obstacles physiques tels que des pierres et du plastique lors de la numérisation. J’ai également modifié des tirages avec des autocollants, de la peinture et des découpes. Plutôt que de viser une cohésion esthétique, j’ai adopté une grande variété de méthodes pour modifier ces images et mettre en évidence leur matérialité », précise l’artiste. Au-delà d’une critique des représentations visuelles de la nature, ses manipulations sont aussi pour elle un moyen de matérialiser les dommages écologiques en cours et d’amener les spectateurices à s’interroger sur leur propre relation au vivant, humain et non-humain.