© Joseph Charroy.
L’Ukraine est au cœur d’une actualité violente. Des manifestants sont morts et des dizaines ont été tabassés. Le Premier ministre vient de donner sa démission et certains observateurs vont jusqu’à parler de guerre civile. Pendant ce temps-là, l’Union européenne et la Russie s’accusent à tour de rôle d’ingérence. Dans ce contexte de crise, nous découvrons les images langoureuses et nostalgiques de Joseph Charroy. Une rêverie qui semble appartenir à un autre temps. Et, pourtant, seuls quelques mois se sont écoulés entre la prise de vue de ce carnet de voyage et l’embrasement de l’Ukraine. Le photographe nous raconte sa démarche :
“Cette série retrace un voyage de cinq semaines en Ukraine à l’été 2013, c’est un carnet de route photographique qui laisse la place à l’intime et à la rêverie. Accompagné de Florence, ma compagne et complice de voyage, je suis parti avec mon vieux Canon A-1 équipé d’un 50 mm et de pellicules couleur. Nous avons vagabondé à l’intérieur de ce grand pays dont la langue nous était parfaitement inconnue, sans avoir d’objectif bien précis, en nous en remettant au hasard des rencontres. Nous avons sillonné de grandes étendues sauvages dans les bus jaunes et les trains bleus. Le jaune et bleu, les couleurs dominantes de ce voyage, on les retrouve sur le drapeau ukrainien qui donne sa place aux éléments naturels : les bandes horizontales bleues et jaunes symbolisent le ciel sur les champs de blé dans les steppes. Nous avons cherché à prendre la tangente dans une région peu visitée par les touristes occidentaux et nous avons été sensibles à l’atmosphère étrange d’un pays en attente, coincé entre l’Europe et la Russie, entre un passé douloureux et un avenir incertain. Ainsi, on retrouve dans ces photos un flottement où l’horizon semble basculer. Les lignes de fuite sont nombreuses, et on ressent le goût de l’échappée. Les images baignent dans une mélancolie douce et rêveuse, elles nous entraînent hors du temps, vers un ailleurs.” J.L.