La Française Coralie Monnet a photographié, durant le premier confinement de 2020, des familles cloîtrées ensemble, à travers leurs fenêtres. Une œuvre humaniste, invitant le regardeur à retrouver son insouciance.
À quoi ressemble la vie de famille lorsqu’on est enfermés ensemble ? Et qu’est-ce qui constitue une famille ? Pour la photographie Coralie Monnet, il n’existe pas de définition propre à ce terme, mais une multitude d’instants spontanés, éphémères qui fusionnent et composent une image vouée à évoluer indéfiniment. Âgé de 30 ans, l’artiste nantaise habite aujourd’hui à Manchester. Après un CAP petit enfance et un premier emploi en tant qu’ATSEM en école maternelle, elle se tourne vers des études d’arts plastiques et découvre la photographie. « Mon travail est axé sur la narration, utilisant un style documentaire, humaniste et poétique pour capturer les relations et connexions uniques entre les personnes que je photographie », explique-t-elle.
C’est dans la ville du nord-ouest de l’Angleterre qu’elle vit son premier confinement. Une quarantaine qui la pousse à imaginer une autre manière de dialoguer avec ses modèles, une façon inédite de partager ses histoires. « J’avais le droit de sortir pour faire de l’exercice une fois par jour. J’ai donc décidé d’utiliser ce temps pour aller photographier des familles, vivant à dix minutes de chez moi, à pied ou à vélo, à travers les fenêtres de leur logement », précise-t-elle.
La grâce de ce qu’il nous reste
Vingt familles acceptent de se prêter à l’exercice. Après avoir répondu à un questionnaire, elles partagent avec la photographe des instants intimes de leur routine. Une plongée dans un quotidien étrange, hors du temps. Croisant images et témoignages, Through the window – families at home livre une vision chaleureuse du confinement, loin de l’anxiété ambiante bien connue de tous. En utilisant le motif de la fenêtre comme fil rouge de son récit, Coralie Monnet construit une bulle rassurante autour de ses modèles, un havre de paix d’où émergent rires, douceur et complicité. Si la démarche de la photographe convoque un certain voyeurisme, telle n’est pas sa volonté. « Je cherchais plutôt à représenter des familles comme vivant dans une bulle, dans laquelle le contact physique avec le monde extérieur est presque interdit », confie-t-elle.
Il y a, dans les images de l’artiste, une aura proche de celle de Sally Mann, qui, comme elle, fait dialoguer l’innocence de l’enfance et la pesanteur des émotions. Dans une époque dystopique, où la crise sanitaire supprime peu à peu nos libertés, où le contact à l’autre est devenu un rêve lointain que l’on se plaît à réimaginer, Coralie Monnet parvient à saisir la grâce de ce qu’il nous reste, l’importance des échanges, de l’amour qui unit une famille.
© Coralie Monnet