Sandrine Expilly, membre de l’agence Signatures, dresse le portrait de la vallée de Romanche, en Isère, de ses paysages et de ceux qui habitent encore autour de la route départementale D1091. Après une exposition, ses photos font l’objet d’un magnifique livre à double entrée, VAL, édité chez Trans Photographic Press.
C’est dans le cadre du festival Paysage > Paysages et du projet National que Sandrine Expilly a amorcé son projet de livre VAL, l’histoire d’un territoire vécu et traversé, celui de la Romanche, en Isère. Un territoire qu’elle connaît que trop bien puisque la photographe est née à Grenoble, à quelques pas de la vallée. « La petite route de l’Oisans m’a vue grandir. De Vizille, nous l’empruntions pour rejoindre les très hautes montagnes du massif, allers-retours en voiture, brouillard tardif dans la vallée, parois rocheuses gigantesques, usines, rivière impétueuse, beauté des crêtes. Nous nous arrêtions rarement, peu de personnes s’arrêtent là », raconte Sandrine sur son site internet. « La traversée de la vallée ne laisse personne indifférent. Habitants, travailleurs, historiens, géologues, sportifs, anciens, enfants, adolescents ou personnes de passage : tous m’ont parlé de leur vallée », précise-t-elle. Un espace inédit pour qui veut réaliser une enquête de terrain approfondie.
Prendre le temps de regarder les gens et les choses
Vallée de la mort lente, c’est ainsi que Sandrine surnomme ce lieu de passage encadré par d’imposantes montagnes. Une réalité que l’on retrouve en feuilletant son ouvrage, car dans ses images, la roche sature l’espace et la lumière est écrasante. Si la vallée se caractérise par une « disparition de l’être humain », la photographe y documente ceux qui y habitent encore et ceux qui y passent.
On rencontre parmi eux Oleg Ivachkevitch, écrivain et vice-président de l’association Coutumes et traditions de l’Oisans. Né à Bourg-d’Oisans, ce dernier raconte l’arrivée de ses parents à Rioupéroux suite aux révolutions bolcheviques.
Rioupéroux, c’est aussi l’endroit où se pose Guillaume Bernard, surnommé « le Prophète », qui pratique le BASE jump (sport extrême qui consiste à sauter en parachute). Six cents sauts à son actif, il ne se lasse toujours pas de « la vue splendide sur les massifs du Vercors et du Taillefer, le mont Aiguille ». Celui qu’il préfère ? Lorsqu’il s’élance du rocher de l’Homme, sur le massif de Belledonne. « C’est comme un grand toboggan rocheux. Et le plus surprenant, c’est à l’atterrissage, quand on voit cette petite vallée au fond, étroite et austère ».
Autant de récits que l’on découvre à la fin de l’ouvrage, en guise de légendes. Car entre chaque double page où s’étale une magnifique photo de paysage de la Vallée, est intercalé un mini livret présentant les portraits de ces habitants. Il s’agit donc d’un livre à double entrée dévoilant les secrets de la vallée. Cette dernière ne laisse personne indifférent, entre « passion enflammée ou rejet total, il est bon de prendre le temps de regarder les gens et les choses », écrit Anne Cayol-Gerin, historienne et responsable du service du patrimoine culturelle du département de l’Isère, dans l’ouverture du livre. Un résumé pertinent de cette démarche astucieuse.
© Sandrine Expilly
Val, Trans Photographic Press, 25 €, 104 p.