La forêt brûle, le brouillard enfumé prolifère, l’écosystème peu à peu disparaît. Un scénario catastrophe qui a pris le dessus sur notre réalité, et ceci Julie Arnoux en a bien conscience. Née dans la région bordelaise, où elle habite depuis 1974, elle a vécu les terribles incendies qui ont dévasté le bassin d’Arcachon l’été dernier. De ce cauchemar éveillé a vu le jour Camsuza, ode à la reconnexion avec la nature. « Il est très difficile de vouloir mettre des mots sur des émotions profondes, qui viennent des tréfonds et qui ne passent pas toujours par l’entendement. Mais je souhaiterais que chacun prenne le temps d’observer, de sentir, de réaliser à quel point la nature, la végétation, nos arbres sont des choses importantes pour notre équilibre mental et physique », avoue-t-elle. S’étant retirée dans les Pyrénées pour créer, Julie Arnoux a débuté une guérison double : celle de l’environnement et de son être. En connexion avec les montagnes, elle a alors réalisé des images qu’elle a ensuite passées en négatif, puis colorisées. S’ensuivent des créations aux horizons uniques où chaque teinte aurait une émotion associée. Un bleu paresse, un orange chaleur, un mauve mélancolie… Le vivant se reconstruit, se réinvente sous nos mines enchantées. « Passer en négatif agit comme un révélateur, changer les couleurs, mais garder le sujet principal, ses contours et son épaisseur. La vision est différente, on prend le temps de regarder, de fixer, de se projeter. Chacun avec son histoire interprétera ces paysages. Même si ces clichés ont été pris en vallée d’Aspe on pourrait les imaginer venus du Japon ou des rivages corses… » Dans ses paysages, quelques nus surgissent. Ce sont ceux d’une série qui a suivi, où l’artiste a utilisé le même procédé, évoquant un lien immuable entre la beauté et la vulnérabilité de l’humain. Pareils à de petits haïkus, les œuvres de Julie Arnoux réparent les blessures du monde et nous plongent dans un univers dont on oserait profaner l’harmonie.
© Julie Arnoux