En 1991, un petit livre broché de 68 pages et 40 photos aux éditions Hazan, intitulé Valparaiso apparaît furtivement dans les librairies. Le nom du photographe est alors largement inconnu. L’ouvrage coûte moins de 50 francs et comme beaucoup d’autres, je tombe sous le charme de cette « brochure » dont la couverture typographique semble fabriquée avec du papier recyclé. Aujourd’hui ce livre est dans toutes les anthologies de la photographie, les collectionneurs se l’échangent à 1000, 1500 ou plus de 2000 euros et Sergio Larrain, entre temps décédé, a acquis une grande notoriété internationale, il fait désormais partie du panthéon des grands reporters du noir et blanc et de l’école Magnum aux côtés de ceux qui furent ses maîtres et compagnons de route, Henri Cartier-Bresson et René Burri en tête.
Depuis 1991, chacun espère une réédition de Valparaiso. La voilà enfin, pilotée par Agnès Sire et Xavier Barral, déjà à l’origine de la première mouture. Mais pas question de faire du revival vintage, ce nouveau Valparaiso est une version revue et augmentée qui s’appuie sur la première édition pour en raconter à la fois la genèse et les multiples échos suscités par son succès. En effet, il faut savoir qu’en 1991, Sergio Larrain a déjà quitté l’univers de la photo, il s’est installé dans un petit village chilien prés d’Ovalle où il s’est lancé dans une recherche mystique à travers le yoga. Toutefois, la sortie de ce petit livre, modeste et radical, l’enthousiasme.
Il se remet à faire quelques photos, et un jour, en 1993, il envoie un paquet avec sa propre proposition éditoriale. C’est ce « Valparaiso » dessiné à la main par Larrain qui est aujourd’hui publié. On y retrouve bien sur le squelette du livre de 1991, et la préface décalée de Pablo Neruda, ami et voisin de Larrain. Toutefois, les ajouts sont nombreux, à la fois sous forme de photos, de textes et de dessins. Sans oublier les leçons de philosophie et les aphorismes qui sont alors devenus plus importants pour Larrain que les images… Nous voilà donc face à un pavé de 212 pages et 120 photographies.
Celles et ceux qui n’ont pas connu le premier Valparaiso tomberont sous le charme. Les autres verront ce livre comme une analyse historique et en quelque sorte la suite, et la fin, du feuilleton Valparaiso. Car ici, le charme n’opère plus… C’est le piège des remake, surtout quand la légèreté du premier jet s’est évaporée. Beaucoup des nouvelles photos rajoutées par Larrain n’apportent rien d’essentiel et le portrait de cette ville portuaire magique se dilue dans une certaine grandiloquence. On en apprécie alors encore davantage l’éditing serré, et le remarquable rythme de la maquette de la version 1991. Mais ne boudons pas notre plaisir au nom d’un purisme nostalgique, et parcourons avec Larrain une dernière fois les escaliers de Valparaiso, ceux qui nous permettent selon Néruda de « faire le tour du monde » !
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Valparaiso
Photos de Sergio Larrain – éditions Xavier Barral
165 x 235 mm – 212 pages
120 photographies (dont 82 inédites)
42 €