Dans l’œil d’Andrea Sena : faire la fête, pas la guerre

19 février 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Dans l’œil d’Andrea Sena : faire la fête, pas la guerre
© Andrea Sena
AndreaSena
« Ma mission face aux patrouilleurs et à police ? Ne pas divulguer la raison de mon errance. J’avais la vie de tous les hommes présents à cette soirée comme responsabilité. »

Cette semaine, plongée dans l’œil d’Andrea Sena, qui s’est attachée à capturer la fête comme acte de résistance en temps de guerre. Pour Fisheye, elle revient sur une nuit d’angoisse passée à chercher l’emplacement d’une soirée clandestine sous la menace des bombes qui tombent.

« Cette image a été prise à Odessa, durant la dernière soirée à laquelle j’ai participé. En été, dans cette ville portuaire pourtant soumise régulièrement aux alertes, les citoyen·nes sortent sans touristes en arrière-plan. Obtenir un taxi pour l’adresse en banlieue avait été très difficile et j’étais arrivée à un premier endroit qui n’était pas le bon. Il était déjà minuit. Je n’avais aucun moyen de me déplacer jusqu’à la bonne adresse, qui se trouvait encore à 30 minutes de voiture – j’étais partie à l’opposé. L’alarme sonne, stridente. Les animaux font la loi.

Un couple qui rentrait chez elleux m’a aidé. Iels m’ont accompagné, m’ont aidé à trouver un moyen de m’y rendre. Je les ai photographié·es pour en garder le souvenir. Le jeune homme ne pouvait pas m’accompagner par risque de mobilisation. J’ai appelé des personnes qui se trouvaient sur place et nous avons tenté, pendant trois heures, de nous y rendre. Les patrouilles ont débarqué également, les bombes explosaient dans le ciel au même moment que les alarmes retentissaient. J’ai dû entendre une dizaine d’avertissements aériens. Ma mission face aux patrouilleurs et à police ? Ne pas divulguer la raison de mon errance. J’avais la vie de tous les hommes présents à cette soirée comme responsabilité.

Finalement, un ami – lui-même policier – d’une fêtarde est venu me récupérer à 03h30, ce qui m’a permis de passer les blocs-posts sans contraintes. Nous sommes arrivé·es deux heures avant le lever du jour – qui arrive subitement en Ukraine. Je n’avais que très peu de temps pour réaliser des images. Celle-ci a été la première. »

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