Dans l’œil de Zen Lefort : fuir la guerre en emmenant l’essentiel

Dans l'œil de Zen Lefort : fuir la guerre en emmenant l'essentiel
Lviv, Ukraine, le 29 avril 2022 © Zen Lefort / MYOP
ZenLefort
« Cette photographie n’a aucune prétention à comprendre la guerre en Ukraine, c’est simplement le cliché d’une jeune fille […] qui, en montant dans le train, devient du jour au lendemain une réfugiée. »

Cette semaine, plongée dans l’œil de Zen Lefort. Aux côtés de six autres membres de l’agence MYOP, le photographe a couvert la guerre en Ukraine. Désormais consignés dans un ouvrage publié aux éditions Manuella, leurs clichés donnent à voir des fragments de vie complexe, où l’horreur du conflit côtoie des scènes plus joyeuses. Pour Fisheye, il revient sur l’une de ses images témoignant de cette réalité.

« Je me promenais sur les quais de la gare de Lviv, en Ukraine, plus précisément sur le quai numéro 3. La guerre a commencé quelques semaines après la journée du 24 février, lorsque les Russes ont envahi le pays. En marchant dans la gare, j’ai constaté qu’elle était devenue un point névralgique où se concentraient les principaux flux de population depuis trois mois. Dans un sens, les hommes âgés de 18 à 60 ans sont obligés par la loi martiale de rester en Ukraine. Certains ont pris les armes et ont dû faire leurs adieux à leur famille sur le quai avant de partir au front pour repousser l’envahisseur quelque part dans l’est, tandis que d’autres, par leurs propres moyens, aident comme ils le peuvent. Dans l’autre sens, vers l’ouest et l’Europe, ce sont des milliers de femmes, d’enfants et de civils non aptes au combat qui embarquent pour fuir leur pays.

En voyant cette jeune fille sur le quai, tenant ce caneton dans une bouteille, serrée contre elle, qui allait monter dans un train en direction d’une destination inconnue, quelque part vers l’ouest, je lui ai demandé si je pouvais photographier son animal de compagnie. Elle a accepté, l’action a duré moins d’une minute : le train arrivait, elle devait partir, plus de temps pour un échange. Je ne saurai ni son nom ni sa destination. Cette photographie n’a aucune prétention à comprendre la guerre en Ukraine, c’est simplement le cliché d’une jeune fille qui fuit la guerre, un détail de ce qu’elle a emporté dans la peur et la précipitation, d’une jeune fille qui, en montant dans le train, devient du jour au lendemain une réfugiée. »

Manuella Editions
Direction ABM Studio et MYOP
300 photographies couleur/noir et blanc
256 pages
35 €
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