Dans l’ombre du vaudou

15 janvier 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Dans l’ombre du vaudou

La photographe française Marie Leroux, née en 1986, signe avec L’heure bleue un portrait métaphorique de la pratique du vaudou. Une série brouillant les pistes entre le visible et l’invisible.

Après avoir étudié les arts plastiques, l’histoire de l’art et l’archéologie, Marie Leroux a intégré l’École nationale supérieure de la Photographie d’Arles, d’où elle sort diplômée en 2013. Depuis, elle poursuit un travail au croisement des disciplines, mêlant les approches plastiques et documentaires.

En 2016, elle découvre le Bénin, pays d’Afrique de l’Ouest considéré comme le berceau du vaudou. « Dans ce territoire, l’animisme – la croyance en une force vitale animant les hommes comme les animaux ou les végétaux – mêlé à d’autres religions reste profondément ancré et visuellement omniprésent », précise-t-elle. Saisie par cette culture souvent diabolisée, la photographe se lance dans un portrait atypique du Bénin brouillant les pistes entre le visible et l’invisible, le profane et le sacré. « Le titre choisi, L’heure bleue, symbolise cet instant où l’on bascule vers une réalité plus mystérieuse, sombre et troublante », ajoute-t-elle.

© Marie Leroux

Où s’arrête le monde des vivants ?

Ancrée dans cette période où la nuit prend le pas sur le jour, la série se veut sombre, sourde. Paysages et portraits d’hommes et d’animaux se répondent, dans une obscurité presque complète. Où s’arrête le monde des vivants ? Peut-on capturer la spiritualité ? En travaillant soigneusement son esthétique, Marie Leroux révèle un univers secret, évoquant le caractère imperceptible d’une religion, mais aussi la volonté du vaudou de se pratiquer discrètement. « Il y a une dualité inhérente à cette croyance : d’une part, les autels, visibles à l’entrée des villages, et d’autre part, les entités et la pratique qui demeurent invisibles », précise l’artiste.

Pensée comme une série de métaphores, L’heure bleue capture les éléments de manière sensorielle. « La pratique est intrinsèquement liée aux forces naturelles, les offrandes faites aux fétiches (figures représentant les dieux du panthéon vaudou) et les cérémonies animistes permettent d’apaiser les divinités et d’attirer leur clémence. Il est question de l’histoire d’un peuple, de son lien avec l’animal qui se fait symbole de sacralité, d’une cosmogonie », rappelle l’artiste. Loin d’exposer une vision exotique du territoire, elle s’immerge au contraire dans les rites et les pratiques, représentant, à la manière de flashs visuels, les contours d’un monde étrange. Corps nus, pythons et paysages nocturnes apparaissent, voilés. Comme les bribes d’un songe qu’on essaie, en vain, de retenir.

© Marie Leroux© Marie Leroux

© Marie Leroux

© Marie Leroux© Marie Leroux

© Marie Leroux

© Marie Leroux© Marie Leroux

© Marie Leroux

© Marie Leroux© Marie Leroux

© Marie Leroux

© Marie Leroux

Explorez
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
© Caroline Sohie
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
Autrefois carrefour de la traite et du commerce colonial, Bagamoyo, sur la côte tanzanienne, juste en face de Zanzibar, est aujourd’hui...
Il y a 1 heure   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Raymond Depardon, l’éloge du passage
© Raymond Depardon
Raymond Depardon, l’éloge du passage
La Galerie Magnum présente Raymond Depardon : Passages, une rétrospective visible jusqu'au 26 juillet 2025. À travers une...
18 juin 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Le palmarès du prix Picto de la Mode 2025 : la mode au croisement des enjeux contemporains
Symbiose © Arash Khaksari
Le palmarès du prix Picto de la Mode 2025 : la mode au croisement des enjeux contemporains
À l’occasion de la 27e édition du prix Picto de la Photographie de Mode, la cour du Palais Galliera s’est transformée en un lieu...
16 juin 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Alex Bex révèle la sensibilité des cowboys texans
Intermission (Big Foot, Texas), de la série Memories of Dust © Alex Bex, France, 3rd Place, Professional competition, Documentary Projects, Sony World Photography Awards 2025.
Alex Bex révèle la sensibilité des cowboys texans
Avec sa série Memories of Dust, le photographe franco-texan Alex Bex ébranle les codes de la masculinité dans les ranchs de cowboys au...
13 juin 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
© Caroline Sohie
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
Autrefois carrefour de la traite et du commerce colonial, Bagamoyo, sur la côte tanzanienne, juste en face de Zanzibar, est aujourd’hui...
Il y a 1 heure   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Isabel Muñoz à Portrait(s) : le corps en majesté
© Isabel Muñoz
Isabel Muñoz à Portrait(s) : le corps en majesté
Jusqu'au 28 septembre 2025, le festival Portrait(s) accueille une rétrospective d’Isabel Muñoz, grande figure de la photographie...
20 juin 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
23 séries de photographies qui prennent vie en musique
Les membres originaux du groupe Oasis, Japon, 1994 © Dennis Morris
23 séries de photographies qui prennent vie en musique
En ce premier jour de l’été, partout en France, la musique est à l’honneur. À cet effet, nous vous avons sélectionné une série de...
20 juin 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Que reste-t-il après le feu ? : des images, des voix, des actifs
Tour immersive en forêt © Alexandre Dupeyron
Que reste-t-il après le feu ? : des images, des voix, des actifs
À l’écomusée de Marquèze, jusqu’au 28 septembre 2025, l’exposition 600° – La forêt après le feu du collectif LesAssociés, pose une...
19 juin 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche