Documenter la route

Documenter la route

Jordi Ballesta et Camille Fallet, les deux commissaires de l’exposition, n’ont pas eu de mal à convaincre Gilles Mora, directeur artistique du Pavillon populaire de Montpellier, par ailleurs spécialiste de la photographie américaine, de travailler sur les paysages documentaires produits par des universitaires, tous reconnus dans leur domaine.

Utilisant la photographie dans une stricte acception documentaire, « ces chercheurs photographes amateurs s’efforçaient non pas d’illustrer, mais de porter attention et questionner », précisent-ils. Jordi Ballesta et Camille Fallet sont donc partis huit semaines sur les routes des États-Unis, parcourant plus de 7 000 km pour écumer les centres de recherche et les domiciles des six auteurs afin d’en rapporter des images en grande partie inédites, qui n’ont été montrées que dans le cadre de publications scientifiques ou en cours, de l’autre côté de l’Atlantique.

En visitant la première partie de l’exposition Notes sur l’asphalte, une Amérique mobile et précaire, 1950-1990, on comprend d’autant mieux cette volonté scientifique qu’on découvre les archives de ces chercheurs photographes classées selon des thématiques architecturales et urbaines. On trouve ainsi des ensembles d’images regroupées par sujets : stations-service, silos à grains, panneaux publicitaires, routes principales… une manière de répertorier les éléments de la culture vernaculaire présents dans le paysage.

Axe commercial, décorations de rue, vendeur de voitures d’occasion, Mission Boulevard, Hayward, Californie, 1967. Photo de J. B. Jackson.<br /> © J. B. Jackson / Pictorial Material Collection, University of New Mexico Librairies
© J. B. Jackson / Pictorial Material Collection, University of New Mexico Librairies | Texte par : Eric Karsenty

On remarque aussi que les universitaires travaillaient au 24 x 36, le plus souvent sans pied, privilégiant des « notes photographiques » prises pendant leur voyage, lorsqu’ils arrêtaient leur voiture sur le bord de la route. « Les six auteurs ont en commun de ne pas avoir cherché à produire des œuvres photographiques, mais d’avoir utilisé la photographie comme mode de notation principal, voire exclusif », précise Jordi Ballesta. Cinq d’entre eux utilisaient surtout la diapositive couleur, support relevant à cette époque d’une pratique amateur, par opposition au noir et blanc en usage dans le milieu fine art. L’autre avantage déterminant de la diapositive était de pouvoir l’isoler et la replacer dans une narration pédagogique en vue d’une projection pendant les cours. Les enseignants pouvant alors redistribuer les images en fonction de leurs propos.

Road trip en mode travelling

« Je pense que ces images ne doivent pas uniquement être considérées comme des documents culturels, qui renverraient à une période de l’histoire américaine, mais qu’elles doivent être perçues comme des “documents d’expérience” »,

insiste Camille Fallet…

Zone industrielle, périmètre historique de Great Falls, Paterson, New Jersey, juin 1973. Photo Chester H. Liebs. © Chester H. Liebs.
Zone industrielle, périmètre historique de Great Falls, Paterson, New Jersey, juin 1973. Photo Chester H. Liebs. © Chester H. Liebs.

L’intégralité de cet article est à retrouver dans Fisheye #23, en kiosque depuis le 10 mars et disponible sur
Relay.com

Explorez
Marie-Laure de Decker à la MEP : le regard sensible d’une photojournaliste
Valéry Giscard d’Estaing devant sa télévision, le soir de son élection comme président de la République française, Paris, 19 mai 1974 © Marie-Laure de Decker
Marie-Laure de Decker à la MEP : le regard sensible d’une photojournaliste
Jusqu’au 28 septembre 2025, l’œuvre de Marie-Laure de Decker s’expose à la Maison européenne de la photographie. Au fil de sa carrière...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
© Caroline Sohie
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
Autrefois carrefour de la traite et du commerce colonial, Bagamoyo, sur la côte tanzanienne, juste en face de Zanzibar, est aujourd’hui...
21 juin 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Raymond Depardon, l’éloge du passage
© Raymond Depardon
Raymond Depardon, l’éloge du passage
La Galerie Magnum présente Raymond Depardon : Passages, une rétrospective visible jusqu'au 26 juillet 2025. À travers une...
18 juin 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Le palmarès du prix Picto de la Mode 2025 : la mode au croisement des enjeux contemporains
Symbiose © Arash Khaksari
Le palmarès du prix Picto de la Mode 2025 : la mode au croisement des enjeux contemporains
À l’occasion de la 27e édition du prix Picto de la Photographie de Mode, la cour du Palais Galliera s’est transformée en un lieu...
16 juin 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Marie-Laure de Decker à la MEP : le regard sensible d’une photojournaliste
Valéry Giscard d’Estaing devant sa télévision, le soir de son élection comme président de la République française, Paris, 19 mai 1974 © Marie-Laure de Decker
Marie-Laure de Decker à la MEP : le regard sensible d’une photojournaliste
Jusqu’au 28 septembre 2025, l’œuvre de Marie-Laure de Decker s’expose à la Maison européenne de la photographie. Au fil de sa carrière...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les coups de cœur #548 : Konrad Hellfeuer et Lucie Boucher
Diversum © Konrad Hellfeuer
Les coups de cœur #548 : Konrad Hellfeuer et Lucie Boucher
Konrad Hellfeuer et Lucie Boucher, nos coups de cœur de la semaine, invitent à ralentir, observer et contempler. Interrogeant les thèmes...
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Les images de la semaine du 16 juin 2025 : expositions, mode et esthétique variées
Entrelacs © Manon Bailo
Les images de la semaine du 16 juin 2025 : expositions, mode et esthétique variées
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye ont été façonnées par des expositions en cours ou à venir, la remise du prix...
22 juin 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
© Caroline Sohie
Caroline Sohie : « La beauté des images n’est pas sans conséquence, elle a un poids »
Autrefois carrefour de la traite et du commerce colonial, Bagamoyo, sur la côte tanzanienne, juste en face de Zanzibar, est aujourd’hui...
21 juin 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas