Agnès b. présente la nouvelle exposition de son fonds artistique à La Fab. Celle-ci est dédiée à l’œuvre d’Harmony Korine dont elle possède la plus grande collection au monde. Jusqu’au 23 mars 2025.
La rencontre entre agnès b. et Harmony Korine résonne comme une évidence. Elle a lieu en 1999 à la Mostra de Venise, autour du film Julien Donkey Boy. Cette même année, la créatrice de mode et Hans-Ulrich Obrist l’invitent à imaginer un projet pour le numéro 12 de Point d’ironie, un périodique atypique sous la forme de carte blanche, qu’iels ont créé aux côtés de Christian Boltanski en 1997. Depuis, la galerie n’a jamais cessé de soutenir le travail de cet artiste dont la première exposition personnelle a été accueillie en 2000. Cette amitié donne aussi lieu à des collaborations éditoriales et cinématographiques. En 2007, par exemple, Love Streams participe au film Mister Lonely, qui suit les pérégrinations d’un groupe de sosies de stars vivant en communauté au fin fond de l’Écosse. En 2009, agnès b. coproduit Trash Humpers, le quatrième long métrage du réalisateur, qui est une plongée dans l’Amérique des oublié·es. L’exposition de 2024, La Peinture figurative contemporaine, montre trois nouvelles œuvres de Korine, acquises en 2023. Aujourd’hui, avec cette première rétrospective, accessible jusqu’au 23 mars, La Fab. entend revenir sur l’histoire de cette amitié hors norme. Les deux artistes se rencontrent autour de leur fluidité et ouverture : avec ce même désir de subvertir les normes, iels basculent de la pratique picturale au cinéma, de la mode aux arts plastiques, en infiltrant la culture au sens large. « Je l’ai tout de suite aimée, elle avait quelque chose de spécial. Elle est comme une âme sœur ou quelque chose comme ça : très sensible avec les artistes », raconte Harmony Korine au sujet de son amie depuis vingt-cinq ans.
Un art de l’erreur
Né en 1973 à Bolinas, en Californie, Harmony Korine est surtout connu pour son travail de réalisateur, notamment pour des œuvres comme Gummo ou Spring Breakers. Il est une figure clé du cinéma indépendant américain, s’intéressant aux cultures underground et marginales des années 1990. Sa production repose sur l’expérimentation, l’exploration de langages pluriels, à la croisée du cinéma, de l’écriture, des arts plastiques et de la photographie. La rétrospective à La Fab. met en lumière la capacité de l’artiste à fuir toute étiquette. Improvisation, humour, répétition, nostalgie et poésie… Korine pratique un art de l’erreur et de l’imprévu, ce qu’il appelle un « Mistakist Art ». Depuis plus de trente ans, cet art interpelle et continue à attirer autant qu’à repousser, avec sa faculté à brouiller les pistes. Figuratif ou abstrait, surnaturel et hypnotique, touchant et dérangeant, l’art de l’erreur pousse sans cesse le cinéma vers de nouveaux horizons. Tout comme le travail d’agnès b., celui d’Harmony Korine mène une réflexion profonde sur l’identité, la société et l’art lui-même. Lors de cette exposition, ce sont deux artistes inclassables et prescripteur·ices qui se rencontrent.