Pourquoi voyager à l’autre bout du monde quand on peut photographier sa ville ? Caleb Stein a arpenté les rives de l’Hudson et les rues de Poughkeepsie, située au nord de New York, et a réalisé des portraits poignants de ses habitants.
Fasciné par les images et leur pouvoir émotionnel, c’est avec évidence que Caleb a choisi la photo pour questionner le monde. Son histoire avec le huitième art remonte à l’adolescence lors d’un coup de foudre pour le travail de trois photographes : Ray Metzker, Harry Callahan et Aaron Siskind. D’eux il apprend qu’il est possible de donner vie au noir et blanc. Caleb nous confie adapter sa démarche photographique à ses projets. Pour réaliser sa série Down by the Hudson, il a marché (beaucoup) et échangé avec les passants. « Aussi souvent que possible, je partage mes images avec les personnes que je photographie », précise le photographe. Il y a deux ans, Caleb ressent le besoin de connaître davantage son lieu de vie. « Il s’agissait pour moi de m’ouvrir, sans jugement, et d’essayer de mieux comprendre ma ville », explique-t-il. À travers ce travail, il nous livre le témoignage d’un lieu touché par la pauvreté, la toxicomanie et la prostitution.
De belles rencontres
Il y a l’Hudson des cartes postales et il y a des lieux plus “négligés”, abandonnés. Caleb documente les seconds à travers les habitants qu’il rencontre. En parcourant ses images, on découvre par exemple la touchante histoire de Virginie. Dépendante à l’héroïne depuis toujours, la femme a perdu plusieurs membres de sa famille, morts par overdose. Un jour, alors qu’il s’apprêtait à la photographier dans un de ses endroits favoris, celle-ci apprend le décès de son plus jeune fils. Le shooting photo se transforme alors en séance de « consolation ». « J’ai été frappé par son attitude : elle alternait entre pleurs et blagues tout en s’excusant : “Je suis désolée, je sais que cela pourrait faire une bonne photo, mais je ne veux pas être vue ainsi.” J’avais, bien évidemment, abandonné l’idée de la photographier. »
© Caleb Stein