Les amoureux de Giulia Bersani

17 décembre 2015   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les amoureux de Giulia Bersani
Depuis trois ans, Giulia Bersani photographie les amants complices et vient de publier son deuxième ouvrage sur le sujet. Entretien. Par Hélène Rocco.

Giulia Bersani a 23 ans et vit à Milan. Elle photographie sa vie de tous les jours en argentique et aime par-dessus tout les projets qui font écho à sa propre expérience. Comme si les images étaient sa thérapie. L’amour, le rapport à l’autre et la naissance d’une complicité l’inspirent particulièrement: elle a déjà publié deux ouvrages sur les amoureux, qui sont malheureusement en rupture de stock. Pour Fisheye, elle s’est prêtée au jeu de l’interview et évoque, pour nous, Lovers II sa série la plus récente. Overdose de tendresse assurée.

FISHEYE / Comment les amoureux sont-ils devenus ton sujet de prédilection ?

Giulia: Il y a trois ans, j’étais célibataire et j’ai ressenti le besoin pressant d’avoir quelqu’un. Une de mes amies, mannequin, était en ville pour quelques jours et on avait prévu une séance de portrait mais très tôt le jour même elle m’a écrit: “viens s’il-te-plait, il faut que tu prennes des photos de moi avec le mec que j’ai rencontré hier soir… On est vraiment adorable !”. J’y suis allée et j’ai réalisé que photographier un couple me faisait du bien. Je me suis mise à chercher d’autres couples et j’ai commencé à travailler sur ce projet.

Si tu devais ne retenir qu’une photo de cette série, laquelle choisirais-tu ?

L’auto-portrait que j’ai pris avec mon copain. Il s’intègre à la fois à mon projet d’autoportrait et à celui sur les amoureux. Et puis je crois que ça deviendra un souvenir précieux avec le temps.

Photo extraite de la série "Lovers II" / © Giulia Bersani
Photo extraite de la série “Lovers II” / © Giulia Bersani

Que voulais-tu montrer dans cette série ?

J’ai travaillé sur ce projet parce que j’avais besoin d’explorer ma tendance à la dépendance et à l’attachement. Je me suis retrouvée à travers toutes ces filles et j’ai étudié leur besoin de trouver quelqu’un de spécial.

Quel est le plus beau compliment que l’on t’ait fait sur ton travail ?

Un jour, une fille m’a écrit après avoir reçu mon livre Lovers II: “L’an dernier, j’ai acheté votre premier livre sur les amoureux. À l’époque, je venais de tomber éperdument amoureuse et ça m’a donné envie d’être encore plus entourée d’amour. Malheureusement, ça ne s’est pas très bien passé avec le mec et je n’arrivais plus à ouvrir votre livre. Il me rappelait trop mon amour perdu. Et puis, dans un moment de perdition, les larmes aux yeux, j’ai commandé Lovers II. J’ai fini par osé l’ouvrir et rêver d’amour. J’ai feuilleté les pages, les joues encore mouillées, mais la douleur s’était envolée. Finalement, le plus important c’est cette obsession de ne pas être seul. Merci !”

Tu as toujours voulu être photographe ?

Non… En sortant d’un lycée scientifique bilingue, j’étais complètement perdue. J’ai essayé le stylisme mais au bout de trois mois, je suffoquais déjà. Ensuite j’ai eu envie d’aller vers la culture et tous les soirs je suivais un cours de photo argentique et numérique. Deux ans plus tard, j’aimais tellement la photo que j’étais sûre qu’il fallait que cela devienne mon métier. J’ai quitté la fac et je me suis pleinement consacrée à mes projets personnels. En fait, je suis fascinée par le pouvoir de ce langage. Depuis mon tout premier cours de photo, je me suis mise à rêver à des projets et après plusieurs années, j’ai eu le courage de suivre mes idées.

Photo extraite de la série "Lovers II" / © Giulia Bersani
Photo extraite de la série “Lovers II” / © Giulia Bersani

Qu’est-ce qui te plait dans cet art ?

J’aime la liberté que l’on a. Avec la photo, je peux m’exprimer et donner mon point de vue aux inconnus qui s’intéressent à mon travail. Je suis très timide, j’ai toujours eu peur du dialogue et en même temps ça me fascine. La photo m’a permis de me découvrir, de découvrir les autres et de travailler sur moi. J’aime observer donc c’est assez magique d’avoir la clé de maisons d’étrangers et de pouvoir étudier, respectueusement, leur réalité de mes propres yeux.

Où puises-tu ton inspiration ?

Ma vie personnelle m’inspire beaucoup et j’aime aussi beaucoup les femmes photographes qui se prennent en photo comme Olivia Bee, Elinor Carucci, Lina Scheynius, Cristina Nunez, Elina Brotherus

Sur quel projet travailles-tu actuellement ?

En ce moment, je travaille sur un projet de portraits de jeunes femmes hypersensibles et qui manquent d’assurance. Une fois encore, ce sujet me concerne personnellement. J’ai du mal à me sentir à ma place et en même temps j’ai l’impression de sortir un peu du lot. Ce projet me fait vivre une expérience intéressante sur le plan émotionnel.

Comment décrirais-tu ton travail en trois mots ?

Personnel, intuitif, nécessaire.

Lovers_05_fisheyelemagLovers_08_fisheyelemagLovers_10_fisheyelemagLovers_11_fisheyelemagLovers_12_fisheyelemagLovers_13_fisheyelemagLovers_15_fisheyelemagLovers_17_fisheyelemagLovers_18_fisheyelemagLovers_19_fisheyelemagLovers_20_fisheyelemagLovers_21_fisheyelemagLovers_22_fisheyelemag

Propos recueillis par Hélène Rocco

En (sa)voir plus

→ Son site web

→ Son compte Instagram

(via Juxtapoz)

 

Explorez
Kincső Bede : Déshéritée
© Kincső Bede
Kincső Bede : Déshéritée
Dans son livre Porcelain and Wool, Kincső Bede se réapproprie son identité transverse par des objets, des lieux et des tissus de la...
04 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Mouche Books édite son premier livre photo-poésie Selfportraits
© Lena Kunz
Mouche Books édite son premier livre photo-poésie Selfportraits
La revue Mouche, qui fait dialoguer le 8e art avec la poésie depuis quatre ans, lance sa maison d’édition Mouche Books avec comme premier...
27 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Corps, catch et injonctions : la séance de rattrapage Focus
©Théo Saffroy / Courtesy of Point Éphémère
Corps, catch et injonctions : la séance de rattrapage Focus
Les photographes des épisodes de Focus sélectionnés ici révèlent les corps et dénoncent les injonctions que nous leur collons. Ils et...
26 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Dans l’œil de Naïma Lecomte : rendez-vous au bord de l’eau après les cours
© Naïma Lecomte / Planches Contact Festival
Dans l’œil de Naïma Lecomte : rendez-vous au bord de l’eau après les cours
Cette semaine, nous vous plongeons dans l’œil de Naïma Lecomte. Jusqu’au 4 janvier 2026, l’artiste présente Ce qui borde à Planches...
24 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Dörte Eißfeldt, lauréate du prix Viviane Esders 2025
© Dörte Eißfeldt
Dörte Eißfeldt, lauréate du prix Viviane Esders 2025
Dörte Eißfeldt reçoit le prix Viviane Esders 2025 pour une œuvre qui repousse les frontières du médium, alliant rigueur conceptuelle et...
Il y a 4 heures   •  
Écrit par Costanza Spina
3 livres à offrir à Noël : réel, fiction et mode
Dior par Yuriko Takagi © Yuriko Takagi
3 livres à offrir à Noël : réel, fiction et mode
Noël approche. À cette occasion, la rédaction de Fisheye vous concocte des sélections de ses livres photo préférés, que vous...
05 décembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Pour Noël, Tendance Floue organise une vente de tirages à moins de 70 euros
© Céline Croze / Tendance Floue
Pour Noël, Tendance Floue organise une vente de tirages à moins de 70 euros
Jusqu’au 10 décembre 2025, les membres de Tendance Floue vous proposent d’acquérir certaines de leurs œuvres grâce à une vente...
04 décembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Kincső Bede : Déshéritée
© Kincső Bede
Kincső Bede : Déshéritée
Dans son livre Porcelain and Wool, Kincső Bede se réapproprie son identité transverse par des objets, des lieux et des tissus de la...
04 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger