Loan Silvestre et Muriel Garidou, nos coups de cœur de la semaine, expérimentent le médium de manière sensorielle. Le premier saisit le passage du temps sur les paysages qui l’entourent, tandis que la seconde explore ses émotions à travers la matérialité de la photographie.
Loan Silvestre
« On a souvent tendance à regarder ailleurs pour trouver l’inspiration, mais parfois, ce sont les endroits les plus proches de nous qui ont le plus à raconter », soutient Loan Silvestre, photographe installé en Belgique. Sur ses images à la douce chaleur ambiante se dévoilent des lieux de l’ordinaire, des paysages qui subissent – parfois de manière subtile – le passage du temps. Sillonnant les territoires qui lui sont familiers, l’artiste compose un projet photographique « intuitif et patient » : De temps en (temps). « Je reviens souvent sur les mêmes lieux à différentes périodes, pour observer ce que le temps transforme ou non », précise-t-il. Les saisons se déclinent, la nuit s’impose, les fleurs fanent, les gens avancent. « C’est une méditation sur la lenteur, sur les changements invisibles ou infimes qui marquent les paysages. Il y a aussi l’idée de mémoire, de trace, d’intimité avec un lieu. Je m’intéresse à la beauté discrète, à ce qu’on ne voit pas au premier regard », confie Loan Silvestre. Les endroits qu’il saisit relèvent de sa propre réalité, des émotions qui le traversent, et loin de se contenter de l’approche documentaire, il explore l’aspect sensoriel du territoire par le médium. « Un paysage peut me rappeler une ambiance vécue ailleurs, ou faire remonter une sensation passée, et c’est cette résonance-là que j’essaie de traduire », conclut-il.
Muriel Garidou
Depuis son retour de Guyane et après avoir subi une violente agression en métropole, Muriel Garidou se tourne vers la photographie, qui rapidement s’impose dans son quotidien. « Elle vient prolonger mes mots, traduire mes sensations et même mes rêves », confie-t-elle. Aujourd’hui installée à Sète, dans le bassin méditerranéen, elle développe une approche artisanale du médium grâce aux techniques argentiques. « Je ne cherche pas à reproduire le réel, mais à l’interpréter, à le faire basculer dans une dimension plus onirique, plus intérieure. Dans ce monde ultra-connecté, j’éprouve le besoin de ralentir », précise l’artiste. Un triton danse sous une eau claire, une présence à l’allure fantomatique se détache de l’image, on la perçoit à peine. Des références bibliques sont détournées avec une pointe d’ironie. « La lumière, les corps et les silhouettes sont au cœur de mon travail. Je développe mes négatifs que je numérise. Je m’aventure aussi dans des pratiques expérimentales comme les soupes, ou encore l’altération volontaire du film développé telle que les déchirures, les brûlures et autres manipulations », explique-t-elle.