« Codex Virtualis est une pratique artistique et une recherche qui remettent en question les définitions conventionnelles de la vie. Il s’agit d’un couplage sémantique d’algorithmes qui s’apparente aux schémas de vie des micro-organismes, refaçonnant continuellement les limites de l’existence. Le projet est ancré dans l’histoire culturelle et artistique des automates et de la quête séculaire de l’humanité cherchant à créer des formes de vie mécaniques. Il en explore les interprétations contemporaines dans le domaine de la vie artificielle (ALife) par le biais de simulations informatiques. En outre, il met l’accent sur les valeurs de la collaboration et de l’échange en faveur de la diversité et de la survie, tant dans les algorithmes que dans la vie microbienne », expliquent les membres d’Interspecifics Lab. Créé en 2013 à Mexico, sous l’impulsion de Paloma López et de Leslie García, le collectif également composé de Felipe Rebolledo, Emmanuel Anguiano and Alfredo Lozano étudie depuis ses débuts les différents phénomènes physiques, biologiques et cognitifs qui, d’une manière ou d’une autre, témoignent de toute la complexité de notre réalité.
« Ces dernières années, l’un de nos thèmes récurrents a été l’observation de la vie microscopique : son comportement, son organisation et son appareil perceptif. Ces projets nous ont amenés vers les travaux de Lynn Margulis, une biologiste qui a entrepris de raconter une autre histoire des origines de la vie en évoquant la symbiose et ses différents modes d’expression. Une partie de ses recherches s’intéresse notamment à la manière dont les eucaryotes [des organismes vivants composés d’un noyau séparé du cytoplasme par une membrane, NDLR] donnent naissance à des formes d’existence plus complexes grâce au phénomène d’association. Cette théorie de l’origine des espèces offre une alternative à la vision darwinienne, où le processus d’évolution résulte de la compétition. Pour nous, il est essentiel de soutenir la diffusion de telles propositions », poursuit Interspecifics Lab.
Parallèlement à cette découverte attrayante, l’équipe a jugé nécessaire de trouver des méthodologies d’observation prolongée pour répondre aux besoins de ses propres recherches. « En règle générale, les cycles de vie de ces organismes sont imperceptibles à l’échelle humaine », souligne-t-elle. Dès 2015, Interspecifics Lab commence à avoir recours au machine learning avec la volonté d’ouvrir de nouvelles perspectives sur les dynamiques complexes du monde microscopique. « Nous considérons l’IA comme une forme d’expansion humaine, comme toutes les technologies. Il s’agit d’un agent matériel qui tire ses capacités de notre imagination et de nos connaissances. Dans un sens plus strict ou technique, l’IA est un ensemble d’outils reproduisant des facultés perceptives et cognitives humaines particulières, telles que les processus d’observation élargis et l’apprentissage par l’expérience », étayent-ils.
Cet article est à retrouver dans son intégralité dans le dernier numéro de Fisheye.