Maxime Frogé ou le charme délicat d’une rencontre avec le hasard

22 février 2023   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Maxime Frogé ou le charme délicat d’une rencontre avec le hasard
Amateur d’histoires en tout genre, Maxime Frogé cherche à en raconter à son tour au travers de son médium de prédilection. Se laissant porter par la légèreté d’un instinct bienheureux, ses compositions déclinent des instants en suspens, toujours empreints de douceur et de bienveillance.

« Je ne sais pas pourquoi, un jour, j’ai ouvert un magazine de mode – sûrement un Vogue, un classique – et la série à l’intérieur racontait quelque chose, nous plongeait dans une certaine atmosphère. Je me suis rendu compte que le photographe avait tissé un même récit sur dix pages. Tout cela m’a rappelé le cinéma – que j’ai brièvement étudié – en beaucoup plus accessible. Je pouvais me lancer tout seul : je n’avais besoin que d’un appareil, d’un sujet et je pouvais sortir une mini histoire photo », commence Maxime Frogé. Quoiqu’elle narre les prémices d’une inclination pour le 8e art, cette anecdote témoigne également d’une rencontre marquante avec le hasard qui ne le quittera plus. Passionné par les images et leur fabrication, l’artiste parisien a fait des signes du destin le leitmotiv de sa propre histoire.

Quelque temps plus tard, alors qu’il poursuivait « des études hasardeuses », le photographe de mode en devenir a reçu un appel inattendu : son interlocuteur a remarqué son travail et lui propose une collaboration. « C’était la première main que l’on me tendait et je sentais que si je refusais, j’allais passer à côté de quelque chose. J’ai quitté le cours auquel j’assistais, j’ai attrapé cette main et je ne suis plus jamais revenu à la fac », se souvient-il. Étranger au monde de la mode, il y découvre une infinité de matières, de mouvements et de tombés qui, à l’image, s’expriment d’une tout autre manière. Sensible aux formes et aux émotions qu’elles suscitent, les vêtements et les silhouettes qu’il capture apparaissent dès lors comme des figures symboliques dont les significations se déclinent selon les regards.

Une aura de mystère

« Je n’ai pas de culture mode, ce n’est pas ce qui m’intéresse. J’aime aller chercher le beau, l’esthétique, le passé et même l’âme, tout compte fait, de mes modèles. J’ai envie de voir ce que les gens peuvent m’offrir lorsque je les prends en photo. Mon souhait est de capturer quelque chose que les autres n’ont pas réussi à saisir en eux », confie Maxime Frogé. Dans ses portraits, cette volonté se traduit par des couleurs tendres et chaleureuses, quelques flous ou fondus vaporeux et des fleurs qui miment les décors et les corps. Le sujet est nimbé d’une aura de mystère, comme s’il émanait de lui toute l’essence de son être dans une générosité singulière, douce et fragile à la fois.

Pour manifester davantage la trace de cette présence humaine autour de laquelle gravite toute sa démarche, l’artiste déchire, annote et recompose ses tableaux dans une pratique qui convoque les sens. À mesure que les fleurs s’épanouissent et embaument les cœurs de parfums enivrants, les personnalités se dévoilent et révèlent leurs couleurs véritables dans des nuances éclatantes. Le mouvement caressant d’un rayon de soleil ou d’un halo de lumière effleure la peau comme de nouvelles étoffes, qui enveloppent la chair d’un manteau évanescent. En contrepoint, les quelques natures sauvages qui composent son œuvre apparaissent comme des havres de paix, où l’environnement serein s’aligne sur les émotions, tels des paysages-états d’âme apaisés. « Ne pas avoir cette culture de l’image libère ma créativité, car je n’ai pas cette pression de me dire que ça a déjà été fait », conclut-il.

© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé
© Maxime Frogé© Maxime Frogé

© Maxime Frogé

Explorez
Eulogy : Sander Coers et les traumatismes intergénérationnels
© Sander Coers
Eulogy : Sander Coers et les traumatismes intergénérationnels
Au fil de ses projets, Sander Coers sonde la mémoire en s’intéressant notamment à l’influence que nos souvenirs exercent sur notre...
19 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Patricia Voulgaris, entre rêves et réminiscences
© Patricia Voulgaris
Patricia Voulgaris, entre rêves et réminiscences
L’artiste Patricia Voulgaris ancre sa pratique dans un dialogue entre réalité et fiction. À travers le noir et blanc, elle crée...
16 avril 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Acedia de Louise Desnos : la douceur de la paresse 
© Louise Desnos
Acedia de Louise Desnos : la douceur de la paresse 
Entre lumière suspendue et tendre mélancolie, Louise Desnos dévoile Acedia, un projet photographique au long cours, sensible et...
16 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Dans l'œil de Lorena Florio : filtrer la lumière
Untitled, de la série Lacerazioni © Lorena Florio
Dans l’œil de Lorena Florio : filtrer la lumière
Cette semaine, nous vous plongeons dans l’œil de Lorena Florio. Dans sa série Lacerazioni, elle donne une impression de...
14 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Fotografia Europea : l'âge des possibles, entre rêves et révoltes
© Vinca Petersen
Fotografia Europea : l’âge des possibles, entre rêves et révoltes
Jusqu'au 8 juin 2025, la ville de Reggio Emilia accueille la 20e édition de Fotografia Europea, un festival qui, cette année, se penche...
24 avril 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Kayla Connors : Ô monde réel
© Kayla Connors
Kayla Connors : Ô monde réel
Puisant son inspiration dans le cinéma, Kayla Connors s’empare des codes de la mode pour conter des histoires singulières, ancrées dans...
24 avril 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
© Alice Quaresma
11 séries photographiques qui mettent le Brésil à l’honneur
L’année 2025 est marquée par la saison France-Brésil. Ce programme a pour ambition de renforcer les liens entre les deux pays en nouant...
23 avril 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Rephotographier les monts Uinta pour montrer que le changement climatique s’accélère
© William Henry Jackson, 1870 et Joanna Corimanya, Anahi Quezada, et Town Peterson, 2024.
Rephotographier les monts Uinta pour montrer que le changement climatique s’accélère
En septembre 2024, le géologue Jeff Munroe et l’écologiste Joanna Corimanya entreprenaient un trek de 50 kilomètres dans la toundra des...
23 avril 2025   •  
Écrit par Thomas Andrei