Nio Far : le poème à la jeunesse sénégalaise d’Eléonore Chellini

13 septembre 2023   •  
Écrit par Ana Corderot
Nio Far : le poème à la jeunesse sénégalaise d’Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini

C’est en documentant avec douceur les élans d’espoir, les envies d’ailleurs, ou juste le quotidien mouvant de jeunes au Sénégal, qu’ Eléonore Chellini, ancienne diplômée des Gobelins, a construit Nio Far. Un projet touchant, reflet d’une nouvelle génération impétueuse et déterminée malgré une société qui peut parfois les malmener.

Tout a pris racine en 2019, alors muée par une envie fulgurante de découverte, un besoin d’aller voir au-delà des frontières, de respirer d’autres atmosphères, de prendre le pouls d’un nouvel univers, Eléonore Chellini est partie sur les routes du Sénégal. De ce périple personnel, Nio Far, une série instinctive au message universel est née. « Le voyage a toujours eu une place importante dans ma vie. Avec ma famille on partait souvent en France. En grandissant, j’ai toujours eu envie d’aller plus loin, de découvrir des ailleurs un peu plus lointains, différents de moi, de ce que je connaissais. En partant au Sénégal rejoindre des amies qui étaient parties y vivre quelque temps, à Thiès dans les terres, à droite de Dakar, j’ai d’abord trouvé les rues fascinantes, je prenais beaucoup de photos de façon compulsive. La série a commencé comme cela, puis elle s’est déplacée vers ce que je découvrais aussi dans des espaces et moments plus intimes. On vivait dans une maison avec une cour partagée par la famille d’Alima, une femme qui avait mon âge, ses deux enfants, sa belle-mère et son mari, sa petite cousine et son mari – qui lui vivait la plupart du temps à Dakar. On s’est liées d’amitié avec elle, je partageais ses matinées à discuter avec elle, les après-midi et les week-ends on partait découvrir les alentours, parfois avec Alima »

Et dans le quotidien qu’elle commence à apprivoiser, dans les paysages dont elle s’imprègne, c’est la jeunesse surtout qui la touche, qui éveille la ville. Avide d’images, elle capte, dans le mouvement, ce qui s’y passe, l’effervescence qu’elle ressent, gardant ainsi des traces fugaces de son périple. Marquée par cette première expérience, elle y retourne en 2022, au même endroit, avec les mêmes personnes. Cette fois-ci, elle veut ralentir la cadence, prendre plus de temps et laisser les choses venir à elle, shootant pour l’occasion avec des pellicules 35mm. Raconter la vie de celles et ceux qui partagent son voyage, témoigner pour créer le souvenir, voici ce qu’elle souhaite rapporter avec elle.

© Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini

Envers et contre tous·tes

« J’aime voir la vie des gens, observer avec tendresse, de façon un peu naïve. Ce que je voulais avec ce projet, c’est montrer la généralité de la jeunesse, mais également dévoiler des singularités, notamment dans les regards, les caractères différents », avoue Eléonore Chellini. De quoi rêvent-iels, à quelle heure déjeunent-iels, à quoi pensent-iels ? Autant d’interrogations bienveillantes éclosent et nourrissent son envie d’apprentissage, tissant une à une le fil de son histoire visuelle. Cri de volonté d’une jeunesse en émoi, Nio Far se lit dans les visages qu’Eléonore côtoie. Traversant les villes et villages pour en documenter ses fluctuations, ses sourires évocateurs. elle fige des instants : une ride en moto-taxi sur des routes terreuses, ou la sérénité d’un moment d’accalmie en famille.

Un lien immuable s’érige dans les rencontres qu’elle fait, une ferveur commune se dessine dans les échanges. Le temps défile au fur et à mesure de la série, déversant avec lui les émotions d’une maturité en construction. Ici, la naïveté de l’enfance ne se perd pas, elle grandit à sa façon. Tous·tes apprennent à faire avec, à bâtir du bon dans la difficulté. Car malgré un pays en feu, malgré une société qui les persécute, la jeunesse continue d’assumer ses aspirations de jours meilleurs, et s’engage vers l’avenir, poussée par un espoir communicatif. C’est elle qui semble porter le pays, et non l’inverse… « Nio far, c’est quelque chose que les Sénégalais·es disent souvent à la fin des phrases, un peu comme un “on est ensemble, ça va bien se passer ». Je trouvais ça magnifique, la manière dont ces deux mots raisonnaient. Intituler ma série comme cela me permettait de montrer la solidarité des jeunes, leur soutien dans la galère.»

© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini
© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini

© Eléonore Chellini

Explorez
Les images de la semaine du 17 novembre 2025 : portraits du passé et du présent
I Saw a Tree Bearing Stones in Place of Apples and Pears © Emilia Martin
Les images de la semaine du 17 novembre 2025 : portraits du passé et du présent
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les photographes de Fisheye dépeignent différentes réalités. Certains puisent leur inspiration...
23 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
5 événements photo à découvrir ce week-end
© Sandra Eleta
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
22 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Rondônia (Comment je suis tombé amoureux d’une ligne), 2023 © Emilio Azevedo
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Présentée dans le cadre du festival PhotoSaintGermain et au musée du Quai Branly, l'exposition Rondônia. Comment je suis tombé amoureux...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Le 7 à 9 de Chanel : Viviane Sassen, l’ombre comme seconde peau
© Viviane Sassen
Le 7 à 9 de Chanel : Viviane Sassen, l’ombre comme seconde peau
Nouvelle invitée du 7 à 9 de Chanel au Jeu de Paume, Viviane Sassen a déroulé le fil intime et créatif de son œuvre au cours d’une...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Cassandre Thomas
La sélection Instagram #534 : film noir
© Lux Corvo / Instagram
La sélection Instagram #534 : film noir
Alors que les jours s’assombrissent et que la nuit domine, les artistes de notre sélection Instagram de la semaine nous plongent dans les...
25 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Dans l’œil de Naïma Lecomte : rendez-vous au bord de l’eau après les cours
© Naïma Lecomte / Planches Contact Festival
Dans l’œil de Naïma Lecomte : rendez-vous au bord de l’eau après les cours
Cette semaine, nous vous plongeons dans l’œil de Naïma Lecomte. Jusqu’au 4 janvier 2026, l’artiste présente Ce qui borde à Planches...
24 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les coups de cœur #566 : Lalitâ-Kamalâ Valenta et Kordélia Phan
© Lalitâ-Kamalâ Valenta
Les coups de cœur #566 : Lalitâ-Kamalâ Valenta et Kordélia Phan
Lalitâ-Kamalâ Valenta et Kordélia Phan, nos coups de cœur de la semaine, documentent des univers spécifiques. La première s’intéresse à...
24 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet