Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Inspirée par les films des années 1990, 2000, la photographe et cinéaste, Noah Pharrell crée, à l’aide d’une intelligence artificielle, les portraits de cette génération réinventée.
Née dans les Asturies en Espagne, Noah Pharrell s’est éprise de la photographie de façon complètement hasardeuse. Tel un éclair, la vue d’une couverture de magazine de mode espagnole réalisée par Txema Yeste l’a happée vers le 8e art pour ne jamais la quitter. Aujourd’hui photographe et cinéaste, elle oscille entre commandes, projets personnels et s’essaie depuis peu à l’intelligence artificielle pour réaliser des images à l’esthétique nineties marquée. « J’ai plongé tête la première dans l’expérimentation, perdant complètement la notion du temps. Les heures se sont rapidement transformées en jours et, avant même que je m’en rende compte, quelques mois s’étaient écoulés. Grâce à cela, je me sentais à nouveau tellement muée par la créativité, débordant d’envie de donner vie à mes idées », raconte-t-elle.
© Noah Pharrell
Dans l’imaginaire millennials
Pour obtenir une image qui la satisfait, il lui faut en moyenne quatre à cinq heures de travail avec l’intelligence artificielle. Planter le décor idéal, construire graphiquement ses détails, ses arrière-plans, ses coloris, ses visages, et enfin un passage sur Photoshop. Une démarche artistiquement proche de son rituel photographique. Ne reniant pas son univers visuel d’origine, elle s’amuse à construire un monde parallèle, influencé par l’imagerie populaire lycéenne des années 1990 et début 2000. Toile de fond de tous ses portraits, la génération des millennials – sa génération – se dévoile dans ses moues muettes, ses traits fluets, ses rêves de grands amours et de joies éphémères. « Mes photos ont toujours été mon moyen d’échapper à la réalité dans laquelle je vis. Elles sont comme ces mondes imaginaires qui vivent dans mon esprit, qui stimulent mes envies ».
Remises de diplômes, vacances à la plage, bal de fin d’années, photomatons d’après-midi entre ami·es, puis les grandes désillusions en perspective. Les petits récits de Noah Pharrell sonnent l’insouciance adolescente et infusent à la manière d’Euphoria, leur dose de nostalgie sombre et enchanteresse. Pour autant, elle nous donne aussi à voir un pan plus critique de l’idéal de beauté. Car ici, tout paraît sensiblement parfait, rien ne dépasse ni fait tache. Le fruit d’un imaginaire visuel chargé de stéréotypes, duquel l’IA s’est nourrie. « Je n’ai jamais été une adepte des retouches excessives au point de perdre ce côté naturel qui fait de nous ce que nous sommes. Je comprends tout à fait le débat sur l’IA et la façon dont elle change rapidement la donne. Il est essentiel de trouver un moyen d’empêcher les images trompeuses de perturber notre réalité. Tout progrès doit s’accompagner d’une dose égale de croissance culturelle et mentale de la part de la société. Nous devons améliorer notre état d’esprit comme nous améliorons notre technologie », avoue-t-elle. Des créations récréatives qui nous transportent allègrement.
© Noah Pharrell