
Le photographe Yan Carpenter présente Giro nos Acessos – littéralement « sortir et marcher dans les rues » – , un voyage à travers les marges urbaines, à découvrir dans le cadre de Photo Days jusqu’au 30 novembre 2025. Figure montante de la scène émergente brésilienne, il y déploie un regard intime et collectif sur les réalités sociales de son pays.
Une après-midi calme dans une ruelle d’une favela brésilienne, une jeune femme avance au milieu des planches en bois qui servent de maisons, des câbles emmêlés au-dessus de sa tête. Ailleurs, deux garçons rient au bord d’une ouverture qui fait office de fenêtre. La chaleur des couleurs – de leur peau, de la lumière du soleil et des briques – enveloppe le regard. C’est ainsi que Yan Carpenter contemple son environnement immédiat, avec la joie radieuse de raconter ce qui lui est familier, lui qui vit et travaille à Guadalupe, dans la zone nord de Rio de Janeiro. « Beaucoup des images de ce travail représentent le mode de vie et l’architecture chaotique typique des rues », raconte l’artiste. Pour qui regarde de loin se mêlent à la fois douceur et amertume, émerveillement et effarement face aux conditions concrètes de la vie dans la misère au Brésil.
Le rythme du quotidien
Certaines images s’attachent à des gestes et traditions menacés, comme cette scène de samba photographiée à distance respectueuse : « La photo prise de dos est une façon de préserver le moment, mais elle est aussi une représentation visuelle du manque de respect culturel dont la samba fait l’objet à Rio », explique-t-il. En conjuguant une observation discrète et une implication directe dans les scènes qu’il traverse, il parvient à saisir une vitalité singulière, mais aussi les tensions propres à ces environnements. Cette traversée intime d’un Brésil multiple, vécu depuis la rue, révèle la complexité de tels lieux. Giro nos Acessos, en effet, rassemble des images prises dans différents États du pays et en montre la diversité culturelle. « Il existe de nombreux Brésil au sein d’une même nation », assure-t-il.


Paysages picturaux
Photographe autodidacte, mais aussi DJ et professeur d’histoire, Yan Carpenter a d’abord été batteur dans plusieurs groupes de rock avant de se tourner vers l’image : « J’ai commencé à m’initier au 8e art avec le photographe de mon groupe. La plupart des visuels que je tente aujourd’hui d’intégrer à mes œuvres s’inspirent du style heavy metal de la scène underground dans laquelle j’évoluais quand j’étais jeune. À Rio, la scène rock s’est effondrée… J’ai donc vendu ma batterie et acheté un appareil photo pour me donner une nouvelle chance », confie-t-il. De cette reconversion est née une pratique instinctive, attentive aux formes de vie ordinaires et à la poésie du réel.
Avec un vrai sens de la composition, qui parfois devient très picturale, en même temps qu’une frontalité documentaire, il parvient à raconter la rue comme un espace d’expérimentation visuelle, peut-être même sociale. Son travail s’est d’abord fait connaître pendant la pandémie avec la série Rodo Cotidiano (2021), qui documentait la reprise des transports publics à Rio et la vie des travailleur·ses – une œuvre qui lui a valu une reconnaissance internationale. Lauréat du prix SAM ART 2024, doté de 20 000 euros, il présente pour Photo Days neuf images issues de Giro nos Acessos à la galerie Soufflot, jusqu’au 30 novembre prochain. L’invitation, issue du partenariat entre le festival de photo et la Sorbonne Artgallery, précède la résidence qu’il effectuera en France avec le soutien de SAM Art Projects.








