Dancing in the street est un ouvrage dédié à Peter Knapp et à la photographie de mode. Sorti en parallèle de l’exposition éponyme, à la Cité de la Mode et du Design, à Paris, il retrace la créativité de ce grand homme, de 1960 à 1990.
Véritable encyclopédie de la mode, l’ouvrage Dancing in the Street est un projet relativement récent. « Nous avons commencé à le développer lorsque nous avons eu la confirmation de l’ouverture de l’exposition », confie Audrey Hoareau, l’une des commissaires. Création inédite et historique, le livre retrace l’incroyable productivité de Peter Knapp. Divisé en cinq thématiques, il s’attache à revisiter le talent, mais également l’audace de ce grand monsieur, directeur artistique de Elle des années 1960 à 1970. Un bel hommage au monde de la mode. « Une exposition est très éphémère, alors qu’un livre laisse une trace durable », ajoute Audrey. « Peter y a ajouté sa patte, c’est un véritable travail de mémoire ».
Dancing in the Street est porté par une liberté nouvelle, dans le monde de la mode. Une esthétique portée par le mouvement du corps et le besoin de confort. « J’ai vécu ce passage de la photo Haute couture à l’image populaire », confie Peter Knapp. « Dès les années 1950, la mode n’était plus une information, mais plutôt une recommandation ». Dans ses shootings, le photographe privilégie ses amies aux mannequins, et les place dans la rue, au milieu d’un monde mouvant. Le vêtement n’est plus au centre du cliché. « Le comportement pouvait apporter quelque chose à l’image. Nous avions une liberté picturale très grande, et nous présentions le vêtement sans qu’il ne soit la seule information valable ». C’est l’avènement des mises en scène, et Peter, ravi de ce changement, joue avec le médium. Il déconstruit les corps, et en coupe des parties, il ajoute des collages à ses clichés et déforme notre perception. Des effets sublimes et résolument inventifs, qui libèrent l’artiste tout autant que ses modèles.
Un artiste irrévérencieux
Cette créativité, Peter Knapp la doit à son talent, mais également à son audace. Terre à terre, celui-ci se distance de la Haute couture dès ses premiers essais. « La photographie de mode, c’est de l’art appliqué », déclare-t-il. « C’est une commande que l’on essaie de réaliser du mieux qu’on peut, pour satisfaire la demande. Ce n’est pas de l’art ». Avec humour et aisance, il s’approprie les propositions des créateurs. Le tailleur Chanel est assorti à des accessoires d’autres marques, afin de « casser ce côté bourgeois », les modèles s’allongent sur des tables blanches pour présenter des maillots de bain… photographiés en hiver. L’avènement du style hippie laisse le photographe perplexe, et le pousse à noyer les créations dans des paysages très colorés, camouflant ainsi la parure elle-même. Des commandes quelque peu insolentes, réalisées avec une grande maîtrise. « La construction est importante pour moi. J’essaie de faire tenir les choses dans la plus grande simplicité. Tout était montage, à l’époque, des montages réfléchis, car réalisés sans Mac », note Peter, avec humour.
En couleurs ou en noir et blanc, géométriques ou bohèmes, les images de Peter Knapp sont de véritables exercices de style. Emblématiques, elles célèbrent la carrière d’un grand nom de la mode. Un homme qui a su brillamment s’adapter. Une magnifique collection.
Dancing in the street, Éditions du Chêne, 45 €, 304 p.
© Peter Knapp