Supprimer pour mieux photographier

19 février 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Supprimer pour mieux photographier

Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Lassé de la surproduction d’images, Karl Alexander Herrmann est convaincu d’une chose : il est nécessaire de supprimer ses clichés.

Architecte de formation, Karl Alexander Herrmann, installé à Baden-Baden, en Allemagne, a découvert la photographie grâce à la chambre noire de son oncle. Si l’arrivée du numérique le pousse d’abord à se désintéresser du 8e art, la surproduction d’image des dernières décennies l’inspire. « Il fallait simplement que je trouve la méthode appropriée à mes créations », précise-t-il.

Intuitif, l’artiste construit un monde sombre et flou où les silhouettes et les objets se tordent, s’étirent vers l’infini. Presque picturales, ses images semblent projeter des échos d’un autre espace-temps. Des tableaux abstraits reflétant la part cachée de notre environnement. « Je m’intéresse au mouvement. Le résultat n’est pas un simple effet, mais une manière de rendre visible ce que l’on ne perçoit pas à l’œil nu. Mes clichés proviennent d’un univers parallèle – je ne crois pas que seul le visible existe », confie le photographe.

Une véritable photo doit s’imposer comme une évidence

C’est dans la multitude que l’œuvre de Karl Alexander Herrmann fleurit. « J’ai longtemps rejeté l’appareil numérique, parce qu’il promettait de produire un flux incessant d’images. Il m’a donc fallu trouver une solution à ce problème : je prends des centaines de photos en une seule session, de manière instinctive, pour n’en garder que très peu », explique-t-il. Avec ironie, l’artiste inverse ce rapport à la consommation d’images. Qu’est-ce qu’une bonne photographie ? Comment peut-elle se démarquer, dans cette marée visuelle ? « Elle doit être complètement cohérente. Je fais mon choix en quelques secondes. Une véritable photo doit s’imposer comme une évidence – sinon elle n’en vaut pas la peine », constate le photographe.

Fantomatiques, ses créations deviennent des œuvres hors du temps. Influencé par les techniques contemporaines, l’artiste s’amuse à ne laisser aucune trace du présent dans ses compositions. Comme pris à l’arraché, ses clichés témoignent d’un instant, aussi bref qu’intense. Un moment figé seulement par son objectif, en appuyant sur le déclencheur à répétition. « Être photographe revient pour moi avant tout à supprimer des images – il se peut d’ailleurs que j’aie déjà supprimé mes plus beaux travaux », conclut-il avec humour.

© Karl Alexander Herrmann

© Karl Alexander Herrmann

© Karl Alexander Herrmann© Karl Alexander Herrmann

© Karl Alexander Herrmann

© Karl Alexander Herrmann© Karl Alexander Herrmann

© Karl Alexander Herrmann© Karl Alexander Herrmann

© Karl Alexander Herrmann

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