La 7e édition des Rencontres Image & Environnement de Zone i a eu lieu du 12 au 14 septembre 2025 à Thoré-la-Rochette, dans le Loir-et-Cher. Comme à l’accoutumée, l’événement a célébré la photographie au temps présent grâce à ses nombreux moments d’échanges, ses expositions et son photo-concert.
Chaque année, Zone i accueille ses Rencontres Image & Environnement au milieu d’une vallée atypique, entourée de part et d’autre par une forêt dense. De fait, il s’agit d’un vaste terrain inondable qui se métamorphose selon les changements météorologiques. Sur place, il faut donc vivre au jour le jour, profiter de l’instant. C’est justement cet ancrage dans le temps présent que Mat Jacob et Monica Santos ont souhaité célébrer à travers ce lieu, devenu espace culturel et festival, dont ils ont fait l’acquisition en 2019. « Ici, on a ce sentiment d’être caché, protégé du monde extérieur. Ça génère une ambiance, un mode de vie aussi, qui est assez unique », souligne le premier. « Il est question de comment être au monde, tout en sachant que sa présence va affecter tout le reste. On parle de l’environnement au sens large », explique la seconde.
Liberté poétique
Depuis mai, le Moulin de la Fontaine abrite En vol. Comme son nom le suggère, l’exposition collective gravite autour de l’oiseau, cet animal qui fascine l’être humain et symbolise la liberté. Sur les deux étages de la structure, le public peut y admirer La Mouette que Sarah Moon a saisie par hasard. Une installation de Marylou reproduit le chant de divers oiseaux à partir de circuits électriques tandis que Xavi Bou nous offre un spectacle contemplatif en montrant des nuées se déplaçant au ralenti. Nathalie Baetens immortalise une déclinaison de nids sur fonds neutres. Elle fait également le portrait de chouettes et de hiboux sur du vélin qu’Antonin Anzil vient piquer à l’aiguille de telle sorte à dessiner des lunes en relief. Rémy Artiges s’immisce, quant à lui, au cœur de la nature pour dépeindre des paysages flous d’où surgissent des lucioles pareilles à des astres lumineux. La poésie se prolonge dans les œuvres d’Irene Zottola. Ici, les mouettes et les goélands ornent des avions en papier et des bandes aux reflets pailletés, accrochées à la charpente, qui rappellent des pellicules de film.
Créer une connexion singulière
Dans le sillage de cet accrochage, de nombreux ateliers, stages et rencontres ont vu le jour. « On essaie de mettre en valeur la création photographique, musicale et tout ce qu’on aime au niveau local, indique Monica Santos. Zone i, c’est aussi une connaissance du territoire qui est très importante à nos yeux. On a compris dès le début que, pour avoir un ancrage régional, il faut que ça résonne chez les gens d’ici. On ne peut pas importer des choses qui viennent de Paris. Il faut qu’on fasse avec la matière première de l’endroit. » Le photo-concert de Céline Croze, Frédéric D. Oberland et Romain Barbot, qui s’est tenu dans la grange, s’inscrit dans cette envie de rassembler, de créer une connexion singulière. Par essence, la performance, mêlant son et image, ne peut exister qu’une seule fois. Même si elle se reproduit, elle évoluera selon le cadre, le public et l’énergie du moment.
Tout au long du festival, les images se sont dévoilées tour à tour lors des Photo Jam Sessions au cours desquelles les artistes ont projeté leur travail avant de discuter avec le public. Élie Monferier a présenté le fruit de sa résidence sur place, durant laquelle la photographe Sylvie Hugues et l’auteur et curateur Christopher Yggdre l’ont accompagné. Ce projet intime, qui a suivi la disparition brutale de son père, témoigne d’une histoire familiale qui dévore les fils. Il cherche, selon les mots de l’artiste, à « comprendre un traumatisme générationnel », à « retrouver de la douceur dans une expérience violente » et s’intéresse, tout compte fait, la manière de transmettre des récits qui nous touchent personnellement. Les pratiques ont également été interrogées lors d’une table ronde avec quelques-uns des membres de Tendance Floue ou encore lors d’une conférence de Sylvie Bonnot et Michel Poivert, animée par la journaliste Brigitte Patient, dans un petit train touristique. Celle-ci portait sur celles et ceux que l’historien définit comme des néoanalogues, soit des photographes qui perçoivent « l’ère anthropocène comme cadre général historique » et considèrent que « le tournant analogique marque un projet politique ». Ce week-end-là, malgré le vent et la pluie, les sourires habillaient les visages. Tout le monde semblait ravi de ces moments de partage. « J’aime l’idée qu’il y ait cette énergie, que les gens se retrouvent et rencontrent la photographie et la musique », conclut ainsi Mat Jacob.