Pratiquant de nombreux arts, Tibet Aslan et le duo Mathis Benestebe et Noah Michel Ambiehl, nos coups de cœur #381, puisent dans leurs influences diverses pour ériger des récits intimes et puissants.
Tibet Aslan
Dessin, peinture, musique, poésie… Depuis son plus jeune âge, Tibet Aslan s’est adonné à la pratique des arts. Il a pourtant attendu 2017 pour toucher à un boîtier pour la première fois. « Je ne pourrais pas vraiment dire précisément quand je suis devenu photographe, mais c’est à cette époque-là que tout a commencé. Ma mère m’avait offert un Canon 700D avec un super objectif – et je m’en sers toujours de temps en temps. Mais ce qui me plaît le plus, c’est l’argentique », raconte-t-il. Privilégiant le noir et blanc, l’artiste venu d’Istanbul puise son inspiration dans les œuvres de Francis Bacon, de Wong Kar-Wai, « ainsi que dans la nature parfois extrême de ma ville de naissance, et de mes expériences vécues là-bas », ajoute-t-il. Dans ses images règne un désordre propre à l’urbain, un tumulte qui ne dort jamais. Les rues escarpées croisent les grandes avenues, et les visages fatigués répondent aux corps dansants, en pleine fête. « Au fil des années, mon regard sur le monde a été changé, influencé par cette ville et ses habitant·e·s. Je capture désormais des pâtés de maisons, des silhouettes floues et moins de détails… Ce qui donne envie d’en voir plus », confie le photographe. Au cœur d’un monochrome au grain prononcé, les scènes qu’il fige donnent à voir des émotions brutes, des sensations fortes au cœur de l’anonymat d’une grande métropole.
© Tibet Aslan
Mathis Benestebe et Noah Michel Ambiehl
« La série
Chimères s’inscrit dans une volonté de représenter des identités queer marginalisées et participe à la création d’archives documentant nos existences. Elle entend illustrer notre quotidien transpédé, absent des trajectoires de vie envisageables dans l’imaginaire collectif », déclarent Mathis Benestebe et Noah Michel Ambiehl. Le premier, photographe de 19 ans étudiant à l’ETPA s’intéresse, depuis le début de son apprentissage à l’écriture documentaire et plasticienne. Une manière pour lui d’explorer avec esthétisme les notions de témoignage, de mémoire et d’identité. « J’ai compris très jeune que le système t’excluais si tu ne correspondais pas aux normes, c’est ce qui m’a poussé à étudier la sociologie. Je m’intéresse à la photographie en autodidacte. Le dessin, la peinture, le tatouage et la danse sont autant de pratiques qui participent à mon expression politique », ajoute Noah Michel Ambiehl. Ensemble, les deux amants ont donc imaginé Chimères, un projet intime relatant leur transition. Influencés par les œuvres de Coyote Park, SMITH ou encore Soraya Zaman, ils construisent tous deux un cocon visuel aux couleurs pastel et à l’ambiance paisible, abordant en contrepoint des thématiques qui leur tiennent à cœur : l’exclusion, la construction et le refuge.
© Mathis Benestebes et Noah Michel Ambiehl
Image d’ouverture : © Tibet Aslan