Pendant près d’une décennie, Peter Funch s’est régulièrement rendu à l’intersection de la 42nd Street et de la Vanderbilt Avenue à heure fixe. Lors de ce singulier rendez-vous, le photographe a immortalisé les êtres de passages pour découvrir les motifs de la ville.
New York, entre 8h30 et 9h30. La population s’affaire dans les rues pour gagner son lieu de travail. Dans le tumulte de cette métropole comme dans tant d’autres, quelques visages se distinguent avant de se perdre dans la foule ou au détour d’un immeuble. Parfois, ils deviennent récurrents et finissent par s’imposer comme de véritables protagonistes de nos matins pressés. La quête de ces silhouettes, anonymes et si familières pourtant, est le domaine de prédilection de Peter Funch. De 2007 à 2016, le photographe s’est installé à l’intersection de la 42nd Street et de la Vanderbilt Avenue – qui titreront tout naturellement la série – pour les immortaliser. S’opère alors un véritable exercice de mémoire. « Pour moi, ce travail de reconnaissance est central. […] Ce projet m’a appris que j’apprécie être un voyeur, être avec les gens, devant eux. J’aime vagabonder, marcher pour observer, et la photographie a été mon passeport pour voyager », assure-t-il.
Les rituels de l’espace public
« Quand j’ai commencé, je voulais trouver des personnes dans la masse, un modèle dans le chaos. Cela s’apparente à une méditation sur leur comportement dans un espace public ambigu. Il est également question de vie privée, d’empathie, d’observation, de traque, et je souhaitais que ce soit une expérience resserrée autour de la routine. J’aime l’histoire des gens ordinaires. Ce sont les moments réels, non mis en scène, que je cherche. C’est la partie la plus fascinante de 42nd and Vanderbilt », explique-t-il. Au fil des images, une narration se tisse ainsi dans un style cinématographique, nourri par la banalité des jours et ses mouvements. À mesure que les individus réapparaissent, de nombreux motifs – parmi lesquels se comptent notamment les inclinations vestimentaires et autres gestuelles – se dessinent.
« Je suis attiré par les concepts, les histoires qui font de la rue un lieu à part entière. Ai Weiwei a exprimé de manière intéressante que “la pratique de la photographie n’est plus un moyen d’enregistrer la réalité. Au contraire, elle est devenue la réalité elle-même” », souligne Peter Funch. S’il conçoit cette œuvre comme « un commentaire social qui illustre les routines et les rituels dans l’espace public d’une grande ville », celui-ci invite tout autant à donner libre cours à son imagination ou à se projeter. Le temps d’un instant, au gré des regards de chacune et chacun d’entre nous, ces singuliers modèles incarnent alors mille et une existences qui se déploient entre les différents clichés, dans le hors-champ.
160 p.
45 €