Elles sont deux, immobiles sous leurs muscles recouverts d’autobronzant comme des statues attendant leur tour de briller. Seules traces d’individualité, les visages sont maquillés à outrance pour en faire des poupées. L’hyper féminin côtoyant l’hypertrophie des chairs. Car il y a du muscle, du tendon, des ligaments forts comme des câbles dans ces déesses échappées d’un film des eighties. C’est pourtant la Russie contemporaine que Kristina Rozhkova photographie dans sa série Bodyland. Une Russie de la peau orange, cousine improbable d’une amérique MAGA et du président qu’elle se souhaiterait. Prenant à rebours l’emphase du concours auquel elle assiste, Kristina Roshkova témoigne ainsi du kitsch improbable d’un pays en vase clos, une « secte » dit-elle dans laquelle toute autre apparence dépare. « J’avais l’air ridicule au milieu de ces gens en autobronzant, avec de faux corps, de fausses dents blanches, en talons et en maillots de bain à paillette, parce que j’étais complètement démaquillée, avec un corps totalement étranger au sport, dans des vêtements d’occasion », se souvient-elle. Si l’humour pourrait laisser penser à une satire – « ce championnat de bodybuilding m’a beaucoup rappelé les expositions canines auxquelles ma mère m’emmenait pendant mon enfance », s’amuse l’autrice – il s’agit ici d’une anatomie grinçante voir d’une revanche : les corps sont photographiés de très près, au flash, comme pour en faire la dissection. Traverser la peau qui n’est qu’enveloppe à performance et à protéines. « Je voulais exposer ses corps pour les faire apparaitre dans ce qu’ils sont pour moi, le symptôme d’une maladie », conclut-elle. Celle d’une beauté factice, surannée en apparence, mais, peut-être, bientôt victorieuse.
Bodyland : déluge de chairs

© Kristina Rozhkova
À lire aussi
Terminé
Concours
Royaux canins
Pour réaliser Best in show, Dolly Faibyshev, photographe américaine, s’est immergée dans l’univers kitsch et surréaliste des concours…
« De manière générale, je m’intéresse à la photographie conceptuelle. Je crois que l’intensité et l’agressivité de mes prises de vues…
Explorez
© Michalina Kacperak / Instagram
On associe souvent les couleurs à des émotions, parfois même à des sons. Elles peuvent modifier une atmosphère, exprimer tantôt la joie...
Éphémère, de la série Deuil blanc © Flore Prébay
C’est l’heure du récap ! À l’approche des vacances de la Toussaint, les pages de Fisheye vous dévoilent de nouvelles expositions à...
Le soleil se fait de plus en plus discret, les feuilles commencent doucement à changer de couleur, quitter sa couette le matin se fait de...
Untitled, 2008 © Anna Di Prospero
La grande halle de la Villette accueille, du 9 au 12 octobre 2025, la nouvelle édition du Salon de la Photo. Rendez-vous en ce début...
Nos derniers articles
Voir tous les articles
© Michalina Kacperak / Instagram
On associe souvent les couleurs à des émotions, parfois même à des sons. Elles peuvent modifier une atmosphère, exprimer tantôt la joie...
Ludivine, attente avant la compétition, Championnat de France, Reims, 2022 © Nathalie Champagne
Nathalie Champagne signe sa première publication aux éditions Photopaper. Figures imposées, figures libres retrace le parcours de...
Série Where free people meet © Cloé Leservoisier
Cloé Leservoisier et Patrick, alias Geekandstar, nos coups de cœur de la semaine, jouent avec les couleurs pour altérer – ou...
Éphémère, de la série Deuil blanc © Flore Prébay
C’est l’heure du récap ! À l’approche des vacances de la Toussaint, les pages de Fisheye vous dévoilent de nouvelles expositions à...