Dans l’œil de Rafael Heygster : la guerre, un business lucratif

21 août 2023   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Dans l’œil de Rafael Heygster : la guerre, un business lucratif
© Rafael Heygster
RafaelHeygster
« La guerre est mise en scène comme quelque chose d’inoffensif, de non mortel.  »

Cette semaine, plongée dans l’œil de Rafael Heygster. Photographe et journaliste indépendant, l’auteur s’intéresse, dans I died 22 times, à la commercialisation de la guerre au sein de notre culture. Pour Fisheye, il revient sur cette image, prise lors d’un salon au Moyen-Orient.

« Cette photo fait partie de ma série I died 22 times, qui documente et interroge la manière dont notre culture perçoit la guerre en dehors des champs de bataille. Elle a été prise en 2019 lors d’un salon de l’armement qui se déroulait à Abu Dhabi, dans les Émirats arabes unis. On y voit des employé·es d’une entreprise d’armement ukrainienne qui attendent des clients à leur stand. Il m’a fallu attendre vingt minutes pour qu’iels cessent de regarder la caméra et m’ignorent enfin.
J’aime cette image parce qu’elle est assez ambivalente : beaucoup de regardeur·ses sont gêné·es par l’âge de ces employé·es, l’innocence qu’on lit sur leur visage, la banalité de la représentation des systèmes d’armes. Nombreux·ses sont celleux qui critiquent les ventes d’armes et s’opposent à la guerre. Mais en parallèle, d’autres voient la nécessité – pour un pays comme l’Ukraine – de pouvoir se défendre militairement contre l’agression russe.
Cette photo est un simple extrait de mon travail. En dehors des salons d’armement, j’ai aussi assisté à des jeux de guerre ou encore des parades militaires. Et dans tous ces différents scénarios, un point commun demeure : la guerre est mise en scène comme quelque chose d’inoffensif, de non-mortel. L’horreur, les atrocités qui se déroulent dans les “vraies” guerres sont tues dans ces performances. Et cela rend la guerre “consommable”. Si mon travail n’entend pas fournir de réponses simples à des questionnements complexes, il encourage toutefois les regardeur·ses à s’interroger sur leur propre positionnement. »

À lire aussi
La guerre n’est-elle qu’un jeu ?
La guerre n’est-elle qu’un jeu ?
Dans I Died 22 Times, le photographe allemand Rafael Heygster tente, en brouillant les frontières entre réel et mise en scène, de…
25 mars 2021   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Dans l’œil d’Emma Sarpaniemi : les dessous de l’affiche des Rencontres d’Arles
Autoportrait en Cindy, 2022, série Deux façons de porter un chou-fleur © Emma Sarpaniemi
Dans l’œil d’Emma Sarpaniemi : les dessous de l’affiche des Rencontres d’Arles
Cette semaine, plongée dans l’œil d’Emma Sarpaniemi. Si son œuvre est actuellement présentée dans le cadre de l’exposition…
07 août 2023   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Heygster Rafael
Heygster Rafael
Photographe
Rafael Heygster est un photographe et journaliste indépendant basé entre Hanovre et Brême, en Allemagne. De 2010 à 2015, il a étudié l’anthropologie culturelle et les sciences politiques à l’université de Hambourg. Depuis 2015, il étudie le photojournalisme et la photographie documentaire à l’université des sciences appliquées et des arts de Hanovre et à DMJX […]
Explorez
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
Il y a 6 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Rondônia (Comment je suis tombé amoureux d’une ligne), 2023 © Emilio Azevedo
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Présentée dans le cadre du festival PhotoSaintGermain et au musée du Quai Branly, l'exposition Rondônia. Comment je suis tombé amoureux...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Milena III
À la MEP, Tyler Mitchell joue avec les codes du portrait formel
The root of all that lives, 2020 © Tyler Mitchell. Courtesy de l'artiste et de la Galerie Gagosian
À la MEP, Tyler Mitchell joue avec les codes du portrait formel
Jusqu’au 25 janvier 2026, la Maison européenne de la photographie présente la première exposition personnelle de Tyler Mitchell en...
19 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Au musée des Arts décoratifs, Guénaëlle de Carbonnières exhume la mémoire
© Guénaëlle de Carbonnières
Au musée des Arts décoratifs, Guénaëlle de Carbonnières exhume la mémoire
Jusqu’au 1er février 2026, le musée des Arts décoratifs de Paris vous invite à découvrir Dans le creux des images. Cette exposition...
19 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
Il y a 6 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Les secrets des météorites dévoilés par Emilia Martin
I saw a tree bearing stones in place of apples and pears © Emilia Martin
Les secrets des météorites dévoilés par Emilia Martin
Dans son livre I Saw a Tree Bearing Stones in the Place of Apples and Pears, publié chez Yogurt Editions, Emilia Martin s’intéresse au...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Jonathan Bertin : l'impressionnisme au-delà des frontières
Silhouette urbaine, Séoul Impressionism © Jonathan Bertin
Jonathan Bertin : l’impressionnisme au-delà des frontières
Jusqu’au 20 décembre 2025, Jonathan Bertin présente, à la Galerie Porte B, un dialogue délicat entre sa Normandie natale et Séoul, ville...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Rondônia (Comment je suis tombé amoureux d’une ligne), 2023 © Emilio Azevedo
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Présentée dans le cadre du festival PhotoSaintGermain et au musée du Quai Branly, l'exposition Rondônia. Comment je suis tombé amoureux...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Milena III