Si vous avez assisté de près de ou de loin aux Rencontres d’Arles 2023, ce visage vous est peut-être familier. De fait, l’affiche du festival était un autoportrait d’Emma Sarpaniemi. La photographe finlandaise nous parle aujourd’hui de Two Ways to Carry a Cauliflower, série qui, dans le sillage de son œuvre, interroge les représentations de la féminité.
Emma Sarpaniemi a toujours eu une inclination pour l’art. Après avoir suivi des cours de peinture ou encore de sculpture, elle s’essaya à la photographie argentique et à son développement à l’âge de 14 ans. L’exercice lui plut et lui donna envie d’expérimenter avec le médium, notamment à l’aide d’un boîtier numérique reçu par la suite à l’un de ses anniversaires. Dès lors, ses proches devinrent ses modèles et la question du regard, élément autour duquel gravite son œuvre aujourd’hui, émergea. « L’échange émotionnel entre un ou une photographe et son sujet m’a toujours fascinée », confie-t-elle. C’est en 2016, dans le cadre d’un projet d’études, qu’elle commença à concevoir ses premiers autoportraits. Cette approche s’imposa à elle comme une manière naturelle de sonder son identité. « De manière générale, dans ma pratique, j’explore les définitions de la féminité à travers des autoportraits performatifs et collaboratifs. Je les réalise à l’aide de mes amies, qui posent également parfois ou participent à la création des costumes, et de ma maquilleuse », explique-t-elle.
Un mélange entre imaginaire et identité
Dans Two Ways to Carry a Cauliflower, Emma Sarpaniemi interroge ainsi les contours de la féminité au travers du jeu, qu’elle perçoit ici comme un pouvoir plutôt qu’une forme de légèreté enfantine. « Il s’agit de suggérer de nouvelles possibilités et de nouvelles façons de se présenter au monde, de montrer comment on peut s’exprimer selon ses propres termes », assure-t-elle. Pensées comme des expérimentations sur le genre, ses images s’appuient sur une esthétique décalée qui retient l’attention et nous invite à prendre du recul sur la société pour se défaire des simulacres. Les tenues et les objets utilisés, aussi singuliers que colorés, ont été chinés dans des marchés aux puces, et sont le point de départ de ses compositions. Les livres jeunesse, mais aussi les peintures d’Alice Neel, de Georgia O’Keeffe et de Chantal Joffe l’inspirent tout autant. « À chaque fois, c’est un mélange entre mon imagination et mon identité, il faut que je puisse me reconnaître », souligne-t-elle. La frontière entre l’artiste et son œuvre se brouille alors. « Parce que je suis à l’origine de clichés dont je suis le sujet, il m’est parfois très difficile de m’en distancier. Ils font partie intégrante de ce que je suis en tant que personne en privé. En cela, mes autoportraits sont intimes et honnêtes. Toute ma vie est consacrée à l’art », conclut-elle.