Gianluca Mortarotti nous emmène en balade. Son terrain de jeux ? L’espace urbain, coloré et en mouvement. Le photographe autodidacte saisit le quotidien ordinaire avec originalité et nous invite à observer les liens qui unissent un·e individu·e et son environnement.
« La photographie a toujours fait partie intégrante de ma vie. Mon père est photographe et, je me souviens qu’enfant, je me retrouvais à développer des tirages dans sa chambre noire ou à l’accompagner lors d’événements ou shootings photo », lance Gianluca Mortarotti. Malgré ces bases techniques, l’artiste italien, désormais installé à Londres, n’a pas étudié le 8e art, préférant l’architecture, l’ingénierie et le conseil dans le secteur de la construction. « Ce n’est qu’à la fin de la vingtaine que j’ai commencé à m’intéresser à la street photography, en lisant des ouvrages théoriques et historiques. Ma passion pour la photo est restée intacte. Durant mon temps libre et lors de mes voyages, j’ai perfectionné mes compétences en expérimentant différents styles, sujets et techniques. », précise-t-il. La présence, la patience et la flexibilité. Tels sont les maîtres mots de celui qui se laisse guider par son intuition et sa curiosité. La prise de vue ? Elle est pour lui une expérience profondément immersive : « Je me contente d’explorer la scène et de voir où elle me mène ». Ce processus n’est pas incompatible avec un temps de recherches en amont afin de saisir pleinement la culture et l’histoire d’un espace, mais Gianluca Mortarotti veille à entretenir le mystère. Son travail résonne particulièrement avec les propos de Diane Arbus, tenus en 1971 : « Une photographie est un secret sur un secret. Plus elle vous en dit, moins vous en savez« .
Jouer avec les références
Qu’il arpente les rues de Paris, de Londres ou de Tokyo, l’artiste évite les clichés, tout en jouant avec les références. Ici, un écho aux œuvres d’Edward Hopper, Edgar Degas ou Édouard Manet. Là, un clin d’œil à Man Ray, Alvin Langdon Coburn, Edward Weston ou encore Florence Henri. « Impossible de ne pas citer ces photographes de la fin du 19e siècle, spécialistes de l’étude de l’espace et de la lumière. Leur capacité à distiller des scènes complexes en abstractions captivantes a certainement influencé ma sensibilité », explique l’auteur italien. Quant il s’agit d’authenticité et d’émotion, il évoque les travaux de Trent Parke, Daidō Moriyama, Harry Gruyaert ou Fan Ho. Pour compléter cette longue liste d’artistes inspirant·e·s, il évoque l’influence d’Ernst Haas, pour son approche unique de l’urbanisme. Il est vrai qu’il partage avec le photographe autrichien et américain une maîtrise du mouvement et de la couleur. « Les villes sont des tapisseries dynamiques où se mêlent l’ingéniosité humaine, la culture et les liens sociaux. Ma compréhension des principes architecturaux et des relations spatiales influence certainement la manière dont je cadre, compose mes photographies, et dont j’analyse les couches du tissu urbain », précise-t-il. Mystères, émotions… Ses images sont aussi empreintes d’une ambiguïté, qui saura attirer ou troubler la vision de chacun·e.