Pendant plus de deux décennies, Alessandra Sanguinetti a documenté, au travers de mises en scène, le quotidien de deux petites filles de la campagne argentine. Les Aventures de Guille et Belinda sont à (re)découvrir jusqu’au 19 mai 2024 à la Fondation Henri Cartier-Bresson.
« Si vous aviez emprunté les chemins de terre dans ce vaste panorama et que vous étiez passé à côté d’elles en train de jouer dehors, vous n’auriez distingué que deux petits points à l’horizon mais pour moi, ces deux gamines étaient exceptionnelles, et elles le sont encore aujourd’hui », assure Alessandra Sanguinetti. Les deux fillettes évoquées s’appellent Guillermina Aranciaga et Belinda Stutz. La photographe les a rencontrées par hasard, au cœur de la pampa argentine, et suit leur évolution depuis 1999. Jusqu’à cette date, aucune des deux cousines n’avait déjà vu de boîtier ou de caméra, qu’elles associaient alors aux télénovelas. Curieuses, elles demandèrent à être photographiées pendant leurs jeux : c’est le début d’une série au long cours, intitulée Les Aventures de Guille et Belinda, à laquelle la Fondation Henri Cartier-Bresson consacre aujourd’hui une exposition.
Au fil des mises en scène, qu’Alessandra Sanguinetti a réalisées en collaboration avec ses modèles, se dessine une vaste frise, marquée par le regard tendre et bienveillant de la photographe. Au départ se trouvent les jeux spontanés d’une enfance vécue dans un milieu rural masculin, dominé par les gauchos et les fermiers. Les rêveries s’imposent comme un moment propice à s’inventer une vie parfaite, au cours de laquelle tout est possible. Puis viennent l’adolescence, l’attente et les doutes qui la composent, et le passage à l’âge adulte. Les deux jeunes filles ont grandi et, désormais âgées d’une trentaine d’années, sont devenues mères de famille. Les Aventures de Guille et Belinda se présente ainsi comme une véritable réflexion sur l’irréversibilité du temps et soulève avec délicatesse la relation fertile qu’entretiennent l’artiste et ses muses.