Margaux Corda et Clara Linciano, nos coups de cœur de la semaine, s’intéressent toutes deux à notre héritage historique, culturel et familial. La première l’étudie au travers de la communauté LGBTQIA+ quand la seconde s’inspire de l’existence de sa grand-mère.
Margaux Corda
Depuis ses débuts dans le 8e art, Margaux Corda, photographe suisse et espagnole, questionne nos bagages historiques, sociaux, émotionnels et familiaux afin de mieux les déconstruire. En 2021, elle entame le projet documentaire intitulé SERVING, à la suite d’une rencontre avec Zion, membre d’un collectif suisse qui organise à la fois des balls et des soirées queer. « La scène est encore jeune en Suisse, explique-t-elle. C’est dans son effervescence grimpante que l’envie de développer une série autour de cette scène et de ses acteurices m’est apparue comme une évidence. » Conçues en réaction aux compétitions de beauté et de mode majoritairement occupées par des personnes blanches, les ballrooms invitent principalement des personnes LGBTQIA+ racisées, le plus souvent victimes de violences visibles et invisibles. Étant elle-même queer, la photographe sait l’importance que revêt la représentation pour pouvoir s’épanouir pleinement. Ses clichés, aux reflets irisés, à l’image de cet univers, sont un appel à l’expression et la célébration des différences constitutives de notre humanité.
Clara Linciano
Pour réaliser ces images, Clara Linciano a puisé son inspiration dans les photographies familiales que conservait sa grand-mère maternelle, née en 1940. « Le projet raconte son histoire. Tout au long de sa vie, elle a souffert de plusieurs pertes qui l’ont affectée émotionnellement. Au fil du temps, elle est devenue un exemple pour moi. Grâce à sa détermination et à sa force, elle est parvenue à aimer de nouveau l’existence, celle-là même qui lui avait enlevé tout ce qui lui était cher », explique la photographe italienne. Ce récit intime se prolonge désormais dans un entremêlement d’archives retravaillées et de compositions plus récentes, qui multiplient les symboles « pour une compréhension universelle ». « La vie, l’histoire, les chemins que nous empruntons m’ont toujours fascinée. Beaucoup ont des parcours étonnants, d’autres sont pleins de drames quand d’autres encore sont remplis de moments de joie et de satisfaction, énumère-t-elle. Chaque personne vit ses émotions différemment. Le mécanisme humain me fascine tellement ! » En créant une distance entre ses sujets et ses sentiments, Clara Linciano laisse une place pour les projections et cherche ainsi à traduire la complexité qui nous habite.