© Manit Sriwani-Chpoom
Jusqu’au 28 septembre à Getxo, au pays basque espagnol, le festival Getxophoto mise sur l’exploration et l’expérimentation de nouveaux formats et lieux d’exposition, principalement dans les espaces publics.
Le but n’est pas de décorer la ville mais de raconter des histoires en images en utilisant des façades, des vitrines, des containers, des bars.
Getxphoto 2014 veut rapprocher les regards des citoyens, générer des émotions, des questionnements et créer des liens entre les individus et les images autour d’une thématique : les luttes.
Alors si vous êtes dans les parages, voici une sélection de 5 expositions à ne surtout pas manquer.
1. Boushra Almutawakel
Née en 1969 à Sana’a au Yémen où elle vit et travaille, Boushra Almutawakel affirme avec force son opposition à la façon dont les fondamentalistes musulmans annihilent les femmes.
Dans cette série, la négation de la femme est mise en évidence par étapes. La dénonciation est symbolique, fondée sur la logique et la force des images. C’est en couleurs que « La mère, la fille et la poupée » vont se fondre dans le noir au fur et à mesure qu’un voile sombre les couvrent. A la fin du processus, trois paires d’yeux demeurent derrière la mince ouverture, sans que l’on puisse décrypter ce qu’ils veulent nous dire.
2. Pieter Hugo
Pieter Hugo est un photographe sud-africain. Il a rencontré un groupe de baladins dans la banlieue de Lagos, au Nigéria, avec leurs animaux – hyènes, singes, pythons – et a décidé de les suivre.
Ces hommes entretiennent avec leurs animaux des relations aussi affectueuses que cruelles. Tendres et brutaux, ils vont de village en village, se donnent en spectacle et vendent des médecines traditionnelles.
On leur prête des pouvoirs magiques, dans la grande tradition des «chasseurs» africains. Ils sont régulièrement accusés de tous les maux : d’être des bandits sans foi ni loi ou des vendeurs de drogue qui utilisent leurs animaux pour commettre leurs délits.
Pieter Hugo a choisi de réaliser des portraits en situation, de ne pas documenter le spectacle ni les relations avec les autres humains, pour souligner l’étrangeté de ces groupes marginaux dans des zones urbaines périphériques et dégradées.
3. Maika Elan
Pendant deux ans, avec tendresse, discrétion et bienveillance, Maika Elan a dressé le portrait de couples homosexuels vietnamiens qui lui ont fait confiance et l’ont accueillie chez eux.
Aucun jugement, aucun voyeurisme, juste un échange aux couleurs subtiles qui met de côté la traditionnelle discrimination et les préjugés extravagants sur les homosexuels.
Dans cet « album de famille » singulier, des couples de tous âges, de tous milieux sociaux. Des homosexuels généralement rejetés dont la photographe a simplement voulu capter l’image de gens « normaux » qui s’aiment.
Tous ces clichés ont aidé certains homosexuels vietnamiens à s’assumer davantage, à lutter contre les tabous familiaux et sociaux et à s’affirmer avec une sérénité nouvelle.
4. Manit Sriwanichpoom
En 2001, pour évoquer à la fois le souvenir des étudiants massacrés en 1976, les multiples coups d’état militaires et la violence dans son pays, la Thaïlande, Manit Sriwanichpoom a réalisé une série de photomontages.
Il remet en scène, dans des documents en noir et blanc de photojournalistes de l’époque, son personnage fétiche «Mister Pink». Un acteur populaire de séries télévisées, toujours affublé de son costume en soie rose flashy et parfaite caricature de la consommation.
Au milieu de l’horreur, il semble se délecter de la situation. On croirait presque qu’il donne les ordres.
Le choix de la forme, la réhabilitation du montage, redonne une actualité à un genre un peu daté, grâce aux possibilités qu’offre aujourd’hui le numérique.
5. Fred Ramos
Fred Ramos joue la carte de la sobriété en choisissant de traiter sous forme de natures mortes le drame de son pays, le Salvador, qui détient le triste record des homicides.
Ces vêtements déchirés et maculés sont tout ce qui reste de personnes disparues. La seule chance, peut-être, de réussir à les identifier.
En s’éloignant de tout pathos, en nous confrontant à des objets qui ont appartenu à des êtres vivants, Fred Ramos nous propose une série, certes macabre, mais qui nous renvoie directement au réel.
Avec une certaine radicalité, le photojournaliste nous demande de regarder le monde en face, sans détourner les yeux. Efficacité maximale.
Festival Getxophoto 2014. Luttes
Commissaire : Christian Caujolle
Expositions jusqu’au 28 Septembre