L’exposition Waters & Meer – Robin de Puy revient sur deux séries de la photographe néerlandaise. Un hommage aux populations rurales étasuniennes et hollandaise qu’elle a côtoyé et qui vivent au contact de l’eau. L’exposition est à découvrir au Musée Henriette Polak jusqu’au 8 septembre 2024.
Robin de Puy raconte sa propre histoire à travers le regard de celles et ceux qui la partagent. Sa caméra s’arrête sur les personnes qui l’entourent et qui constituent le cœur d’une vie rurale en étroit contact avec l’eau. Dans ses clichés, elle parvient à faire ressortir les qualités intimes des individus, à établir de fortes connexions avec eux. Waters & Meer regroupe deux de ses séries majeures, Down By The Water (2022) et Waters (2023), dans lesquelles elle part à la rencontre de la population de l’Amérique rurale et des Pays-Bas.
Dans les territoires qu’elle parcourt, l’eau est au centre du paysage. Elle est perceptible dans chaque portrait, comme un élément constituant de la personnalité de ses sujets photographiques. Qu’elle soit en trame de fond ou qu’elle touche les genoux des habitant·es en les enveloppant, l’eau façonne les regards et les récits. Elle rend tout paysage et toute rencontre particulière, irréelle, hors du monde. Aux États-Unis, par exemple, Robin fait la connaissance d’un chaman de onze ans qui l’accompagne dans un territoire interdit, elle se promène en voiture avec quatre frères rieurs sur la banquette arrière, et elle croise le chemin d’un chiromancien qui lui donne immédiatement les clés de sa maison. Au fil des rencontres, un livre se crée, qui raconte ce monde suspendu dans lequel elle parvient à se sentir chez elle.
Des États-Unis aux Pays-Bas, des liens insoupçonnés
Robin de Puy vit depuis plusieurs années à Wormer, un petit village entouré d’eau au nord d’Amsterdam. Ce sont les « icônes » locales de petites villes qui ont capturé son attention – ces personnages qu’elle a souvent rencontrés lors de ses voyages à travers les paysages américains. Dans les séries exposées, elle s’intéresse alors d’abord à son expérience étasunienne, puis, à son entourage à Wormer, pour étudier les similitudes entre ces deux territoires si éloignés.
La série Waters raconte l’histoire de l’inondation de 1953, la pire catastrophe naturelle du 20e siècle aux Pays-Bas. Robin de Puy a grandi à Oude-Tonge, en Hollande méridionale, où le nombre de mort·es a été le plus élevé. Elle brosse le portrait d’habitant·es de l’île qui ont vécu cet événement ou ont grandi dans l’ombre d’un traumatisme auquel leurs parents et grands-parents ont survécu. C’est lors des confinements de 2020-2021, que la photographe, ne pouvant plus se déplacer, tourne sa caméra vers ses voisin·es. Des liens insoupçonnés se tissent entre ses rencontres rurales outremer et son entourage au Pays-Bas. Partout, le rapport à l’eau est omniprésent. Il rythme les histoires, dramatiques comme heureuses, de ces communautés. « Moins je voyage, plus je me tourne vers l’endroit où je vis, explique-t-elle. Je vois comment mon nouvel environnement prend soin de moi. Comment le boulanger et le marchand de légumes apportent mes courses sur le pas de ma porte tous les samedis matin. Comment toutes sortes de personnes appellent cet endroit leur village, leur quartier, leur maison. Je vois des familles qui vivent ici depuis des générations, je vois des réfugiés, des exclus et des diplômés, je vois la diversité urbaine mêlée à l’état d’esprit d’une petite ville ».