Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur les œuvres et les sujets qui les inspirent particulièrement. Aujourd’hui, Caroline Heinecke nous plonge dans son univers singulier, fait de couleurs vives et de compositions insolites.
Si tu devais ne choisir qu’une seule de tes images, laquelle serait-ce ?
« Headless match » de ma série Masters of Things.
La première photographie qui t’a marquée et pourquoi ?
« Amanda and her cousin Amy » de Mary Ellen Mark. Il me semble que j’ai découvert cette image très tôt, sur une carte postale, dans un musée d’art, et elle a immédiatement déclenché en moi plusieurs sentiments en même temps. D’une part, je l’ai trouvée repoussante et triste et, d’autre part, j’ai été impressionnée par la nonchalance et le regard d’adulte cool de la jeune fille qui fume.
Un shooting rêvé ?
Une journée avec 100 lapins nains dans une prairie, et en faire une macro.
Un ou une artiste que tu admires par-dessus tout ?
Hilma af Klint.
Une émotion à illustrer ?
Le dégoût.
Un genre photographique, et celui ou celle qui le porte selon toi ?
La photographie conceptuelle, celle de Cindy Sherman et Sophie Calle.
Un territoire, imaginaire ou réel, à capturer ?
Le pays du lait et du miel. Il s’agit d’un lieu fictif tiré de divers contes de fées où tout est accessible en abondance. Là-bas, le lait, le miel et le vin coulent dans le lit des rivières, à la place de l’eau. Tous les animaux sautent et volent, ils sont précuits et prêts à être mangés. Les maisons sont faites de gâteaux. Les pierres sont remplacées par du fromage.
Une thématique que tu aimes particulièrement aborder et voir aborder ?
L’étrangeté humaine.
Un événement photographique que tu n’oublieras jamais ?
L’exposition d’Arthur Jafa, Live Evil, présentée à Arles, en 2022.
Une œuvre d’art qui t’inspire particulièrement ?
Fotonotities de Hans Eijkelboom. À partir de 1992, il se lance dans l’élaboration de ses Fotonotities, reprenant discrètement la main sur le boîtier. Ces tentatives photographiques se déroulent dans les rues commerçantes animées des grandes villes, lors de sessions qui durent entre vingt minutes et quatre heures. Dans des endroits comme Arnhem et Amsterdam, ainsi que dans d’autres paysages urbains néerlandais, son objectif capture les passants, documentant leurs vêtements, leurs gestes et leurs routines à travers des critères redéfinis quotidiennement. Il en résulte un vaste ensemble de tirages, méticuleusement présentés en fonction de motifs, de jours et d’années, composant un « atlas des rues » particulier. Ses projets approfondissent l’évolution et l’existence d’images idéalisées et imaginaires, en explorant les clichés photographiques, les préjugés et les processus impliqués dans la formation de types et la comparaison, qui servent tous d’éléments structurants fondamentaux.