Winning africa : frères de sueur

14 septembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Winning africa : frères de sueur
© Guillaume Landry
© Guillaume Landry

Loin des clichés, Guillaume Landry, photographe professionnel depuis 2005, fait émerger des corps en mouvement, des corps au sport. Avec Winning Africa, shooté au Kenya, au Tchad, au Sénégal et au Maroc, il saisit la force et la fragilité victorieuse de ces nouveaux atlas africains.

Le sport et la photographie peuvent être des drogues dures. Guillaume Landry s’est plongé dans l’un comme dans l’autre avec l’obsessionnel engouement d’un passionné : « depuis quatre, cinq ans, j’ai réalisé la place que le sport prenait dans ma vie, et c’est naturellement que j’ai commencé à faire des portraits de sportif·ves, notamment de boxeur·ses. C’est ce qui a été l’élément déclencheur de ce projet », explique-t-il. En 2018, au cours d’un voyage, il cherche une salle de boxe – sport qu’il pratique lui aussi – à Nairobi au Kenya. Il tombe sur le Pumwani Social Hall. Les murs sont défraichis, mais l’essence du noble art est là : « J’y ai trouvé des athlètes guidé·es par une incroyable passion et le rêve d’une vie meilleure. Des personnes incroyablement érudites et dédiées au sport, malgré les défis économiques et politiques », confie-t-il.

Le corps comme instrument principal

Saisis avec un Mamiya RZ, la sueur, les grains de sable, l’intensité des regards portent. Les clichés disent l’élimé du short, la rugosité du survêt, la chaleur du muscle et la tension du tendon. Mais il ne s’agit pas de décrire une anatomie fantasmée : ici le mouvement domine, l’intention y transparaît. « J’ai la chance de prendre en photo des personnes dont le corps est l’instrument principal. Les boxeurs, les lutteurs ont des corpulences qui imposent déjà, à celui ou celle qui les regarde, une forme de fascination. Suivant l’angle, le mouvement et la lumière les corps m’apparaissent comme une représentation de ce qu’ils sont dans leur pratique, de ce qu’ils représentent », explique l’auteur. Des hommes donc, dans l’apprêté de l’effort, musclés ou non, mais tendus vers le devenir et les métamorphoses qui sont aussi celles du photographe lui-même.

© Guillaume Landry

© Guillaume Landry
© Guillaume Landry

Le sport : un dynamisme à l’image du continent

Car Guillaume Landry, à force de voyages, a changé d’univers. D’abord influencé par la photographie de mode ou de commande avec laquelle il a fait ses armes – « beaucoup de mise en scène, des images drôles ou percutantes, mais très posées avec des lumières artificielles et super esthétiques. J’étais captivé par tous les paramètres que ces photographes mettaient en œuvre pour arriver au résultat d’une photo. Le casting, les lumières, le spot, le stylisme… et avant tout l’idée ! », précise-t-il – il se tourne aujourd’hui vers une approche plus documentaire : « Je suis vraiment passé d’un univers à un autre avec les années. Cela va aussi avec mon état d’esprit », reconnaît-il.  Il cite aujourd’hui, pour modèles, Frank, Winogrand, Parks, triade magique des classiques. Entre le noir et blanc de ces figures tutélaires, et la couleur de cette série africaine la distance peut sembler grande, mais le même désir d’authenticité y transparait – la nécessité de raconter le monde tel qu’il va. Guillaume Landry croque ainsi « l’âme et l’intensité des lieux d’entraînement qui transpirent la détermination, loin des projecteurs et des salles de sport clinquantes ». S’y retrouve le dynamisme du continent à la population la plus jeune du monde, mais souvent invisibilisée. Or les corps parlent ici, les droites – gauches disent les victoires à venir, les voix qui se feront entendre : « le sport est, selon moi un langage universel qui transcende les barrières sociales et culturelles, et qui offre une connexion réelle avec les communautés locales », conclut-il.

© Guillaume Landry

© Guillaume Landry

© Guillaume Landry
© Guillaume Landry

© Guillaume Landry
© Guillaume Landry
© Guillaume Landry

© Guillaume Landry
À lire aussi
Ces photographes utilisent le sport pour aborder des sujets de société
© Felipe Jácome / Sveltana Onipko
Ces photographes utilisent le sport pour aborder des sujets de société
Les photographes publié·es sur Fisheye ne cessent de raconter, par le biais des images, les préoccupations de notre époque. Parmi les…
28 août 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Jeux olympiques : ces séries de photographies autour du sport
© Cait Oppermann
Jeux olympiques : ces séries de photographies autour du sport
Ce vendredi 26 juillet est marqué par la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024. À cette occasion, nous vous…
26 juillet 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Explorez
Rencontres du 10e 2025 : une biennale en prise avec le monde
© Chloé Nicosia, One Hundred Trillion Dollars / Courtesy of the artist and Rencontres photographiques du 10e
Rencontres du 10e 2025 : une biennale en prise avec le monde
Pour cette édition 2025 des Rencontres photographiques du 10e, qui défie une nouvelle fois les attentes, les photographes mis·es en avant...
07 octobre 2025   •  
Écrit par Milena III
Performer l'invisible : Hoda Afshar et l'acte de regarder
Speak the Wind, 2015-2020 © Hoda Afshar, Courtesy de l'artiste et de la Galerie Milani, Brisbane, Australie.
Performer l’invisible : Hoda Afshar et l’acte de regarder
Avec Performer l’invisible, Hoda Afshar transforme une partie du musée du quai Branly – Jacques Chirac en espace de réflexion sur le...
30 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les images de la semaine du 22 septembre 2025 : poésie, transmission et écologie
© Léo d'Oriano
Les images de la semaine du 22 septembre 2025 : poésie, transmission et écologie
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les images publiées dans Fisheye donnent à voir des messages d’émancipation, de ruptures avec les...
28 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Valentin Derom : photographier le soin dans toute son ambivalence
© Valentin Derom
Valentin Derom : photographier le soin dans toute son ambivalence
Avec Support Systems, Valentin Derom explore les gestes de soin là où on ne les attend pas : dans les étables, aux côtés de son père...
26 septembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Pooya Abbasian remporte la 3e édition du prix Art & Environnement
Oxalis (détail), 2024 © Pooya Abassian
Pooya Abbasian remporte la 3e édition du prix Art & Environnement
Lee Ufan Arles et la Maison Guerlain ont annoncé hier, à la Guerlain Academy, le nom du troisième lauréat de leur prix Art &...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
13 expositions photographiques à découvrir en octobre 2025
Residency InCadaqués 2025 © Antoine De Winter
13 expositions photographiques à découvrir en octobre 2025
La rentrée scolaire est souvent synonyme de foisonnement d'expositions. Pour occuper les journées d'automne et faire face à la dépression...
Il y a 6 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Retrouvez Fisheye au Salon de la Photo 2025 !
Untitled, 2008 © Anna Di Prospero
Retrouvez Fisheye au Salon de la Photo 2025 !
La grande halle de la Villette accueille, du 9 au 12 octobre 2025, la nouvelle édition du Salon de la Photo. Rendez-vous en ce début...
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Rencontres du 10e 2025 : une biennale en prise avec le monde
© Chloé Nicosia, One Hundred Trillion Dollars / Courtesy of the artist and Rencontres photographiques du 10e
Rencontres du 10e 2025 : une biennale en prise avec le monde
Pour cette édition 2025 des Rencontres photographiques du 10e, qui défie une nouvelle fois les attentes, les photographes mis·es en avant...
07 octobre 2025   •  
Écrit par Milena III