À l’occasion des dix ans de Fisheye, les membres de sa rédaction reviennent, à tour de rôle, sur trois éléments qui les ont marqué·es : une rencontre, une œuvre photo, un événement. Lumière cette semaine sur la sélection d’Apolline Coëffet, journaliste.
La rencontre : Hugo Mapelli
Faire un tour d’horizon de ses articles passés est une expérience singulière, d’autant plus lorsque celui-ci implique de faire des choix, et ne relever qu’une rencontre est loin d’être chose aisée. Une atmosphère particulière, un sujet qui nous éclaire, une personnalité inspirante… Je ne vous apprends rien : chaque échange laisse des traces pour différents motifs. Aujourd’hui, j’ai toutefois décidé de revenir sur mon entretien avec Hugo Mapelli, photographe de mode dont la passion et l’enthousiasme sont communicatifs. Quand je me suis rendu chez lui, cela faisait très exactement six mois que j’étais arrivée à Fisheye. Mon stage s’achevait et l’avenir était encore sibyllin en quelques points. Au fil de notre conversation, mon interlocuteur illustrait ses propos en me montrant ses projets en cours, mais aussi le laboratoire dans lequel prend vie l’essentiel de ses superbes créations, les livres qui l’inspirent le plus et qu’il collectionne depuis des années. Dans cette parenthèse en suspens, tout faisait sens et m’a rappelé la raison pour laquelle j’aime tant ce métier. J’aime sa propension à nous offrir un voyage permanent vers des contrées inattendues qui n’auront de cesse de nous apprendre sur le monde, les autres et nous-mêmes.
La série : The Fifth Generation, Esther Gabrielle Kersley
Parce que je voue un amour profond pour les anecdotes en tout genre, je ne pouvais pas choisir une autre série que The Fifth Generation d’Esther Gabrielle Kersley. C’est au hasard de ma curation que j’ai découvert le travail de cette ancienne journaliste pour une entreprise de fact-checking. Comme un clin d’œil à ce quotidien révolu, la photographe britannique a mené, en images, toute une recherche sur les fake news et autres théories du complot qui gravitent autour de la 5G. Associant témoignages recueillis sur les réseaux sociaux à des clichés tirés d’archives ou immortalisés par ses soins, elle donne à voir, sans jugement ni complaisance, une réalité souvent tournée en dérision. Cette thématique très précise et les enjeux qu’elle comporte m’ont rappelé l’objet d’un des cours que j’ai suivis à la fac. Amusée par le souvenir qu’il m’évoquait, j’ai cru bon de soumettre ce sujet en conférence de rédaction. Ce fut le premier papier long format que j’ai signé pour le magazine physique.
L’évènement : Vogue 1920-2020 au palais Galliera
Être journaliste dans la culture amène à assister à un certain nombre d’évènements qui offrent parfois quelques images rémanentes. En guise d’exemple, je pourrais très bien citer l’une des expositions du Pavillon Populaire, que je trouve toujours d’une grande justesse, ou d’autres voyages de presse qui m’ont laissé une impression favorable. Pourtant, c’est au cœur de Paris qu’a eu lieu la manifestation dont je m’apprête à vous parler. Un jour brumeux de novembre, je me suis rendu au palais Galliera, seule, pour visiter une rétrospective consacrée à un média bien connu de celles et ceux qui apprécient la mode. Si je partage une inclination paradoxale pour ce domaine qui m’anime autant qu’il me rebute, un autre aspect dont Vogue s’est fait l’une des figures de proue me fascine. Entre ses pages, le magazine centenaire, aussi prescripteur que libérateur, a toujours laissé une place de choix à la photographie, témoignant d’une évolution à laquelle il a largement participé. Comme le traduisaient volontiers les 400 œuvres présentées, dès ses balbutiements, le 8e art a trouvé dans la mode un partenaire de taille. Au fil du temps, celle-ci n’a eu de cesse de révéler de grands noms du milieu qui se sont plu à métamorphoser leur médium de prédilection de même que les sociétés qu’ils ont connues.